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vancer dans les flots jusqu’à plusieurs lieues du rivage sans courir le risque d’être englouti. Il en est ainsi sur tous les bords de la Caspienne septentrionale : partout les côtes sont basses, partout la mer se présente comme un véritable steppe inondé qu’une soudaine baisse de niveau transformerait en plaines semblables à celles d’Astrakhan. Le bassin maritime auquel s’applique cette observation est trois ou quatre fois plus étendu que la mer d’Azof ; mais nulle part la profondeur ne dépasse 15 ou 16 mètres ; des bancs de sable très nombreux y rendent la navigation difficile ou même complètement impossible, et les fleuves qui s’y déversent, le Terek, le Volga, l’Oural, l’Emba, travaillent sans relâche à le combler de leurs alluvions : on pourrait lui donner le nom de mer des steppes.

Au sud de ce grand marécage, qui est la simple continuation des steppes, et dont l’axe est dirigé du sud-ouest au nord-est, parallèlement aux plaines d’Astrakhan, commence la véritable Caspienne. Elle se compose de deux bassins que la péninsule d’Apchéron ou de Bakou sépare l’un de l’autre. Ce prolongement du Caucase s’avance très loin dans la mer et projette une longue pointe de bancs de sable qui vont à la rencontre d’autres bas-fonds enracinés sur la rive orientale ; d’après la tradition locale, on pouvait autrefois se rendre à pied sec de Bakou aux steppes de la Tartarie, et les sillons creusés par les pluies dans le sol argileux de la péninsule sont considérés comme d’anciennes ornières de chars. Ces assertions n’ont rien de fondé ; mais il est certain qu’un seuil sous-marin s’étend d’une rive à l’autre. On n’a pas encore exécuté un assez grand nombre de sondages pour que la profondeur moyenne des deux bassins soit bien connue. M. de Baer pense que la dépression la plus considérable de toute la Caspienne doit se trouver au nord de la péninsule d’Apchéron, à peu près sous la latitude de Derbend et à une soixantaine de kilomètres du rivage ; cependant, en raisonnant par analogie, on serait amené à croire que le bassin méridional est le plus profond des deux, car il est plus large, et une abrupte chaîne de montagnes le domine en partie. Les sondages sembleraient confirmer cette opinion. M. de Baer lui-même, jetant la sonde à quarante-deux milles de la côte d’Asterabad, n’a pu trouver le fond avec une corde verticale de 540 mètres ; depuis, on aurait opéré près du même endroit un sondage de près de 900 mètres.

Ainsi la Mer-Caspienne se divise en trois parties distinctes : celle du nord, considérable seulement par sa superficie, est très peu profonde, et contient un volume d’eau beaucoup moindre que chacun des deux autres bassins. Ceux-ci se ressemblent par la profondeur de leurs eaux et par les traits physiques de leurs rivages ; mais ils appartiennent à deux zones climatériques bien différentes. Au nord