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d’obtenir de ce pouvoir. Les deux garanties qu’on cherchait dans la souveraineté temporelle étaient celles-ci. On voulait d’une part que le pape et ses coadjuteurs nécessaires dans l’exercice de leur ministère spirituel fussent indépendans ; on voulait d’autre part qu’ils fussent assurés d’un revenu suffisant pour fournir à toutes les exigences du culte et du ministère spirituel.

Commençons par la moins importante de ces garanties, celle du revenu. Elle ne saurait présenter de difficultés dans la solution italienne. L’Italie a offert et offre à la cour de Rome la valeur en propriété qu’elle voudra, sous la forme qu’elle préférera. Elle mettra à la disposition du saint-père ou des terres ou des valeurs mobilières. La cour de Rome constituera suivant sa volonté le fonds dont elle estimera le revenu nécessaire au gouvernement de l’église. Ce fonds sera sa propriété, elle l’administrera, elle en usera comme elle jugera convenable. Si le pape acceptait des terres en Italie, elles seraient affranchies de tout impôt, de toute servitude qui pourrait lui faire sentir la charge d’une souveraineté étrangère. S’il veut des possessions hors de l’Italie, il sera maître de les acquérir. Il n’est plus ici question de ce tribut des pays catholiques qui aurait constamment soumis l’existence matérielle du saint-siège aux discussions et peut-être aux caprices de divers gouvernemens et des assemblées délibérantes de plusieurs peuples. A combiner un tel arrangement, il ne saurait y avoir de difficultés pratiques. Il est clair qu’à de telles conditions les ressources nécessaires à la papauté seraient assises d’une façon plus sûre et plus avantageuse que ses ressources actuelles, formées d’impôts qu’il faut lever sur des pays mécontens et ne payant qu’à regret, d’impôts dont les révolutions tarissent le revenu ou rendent le recouvrement impossible.

Mais ce n’est pas sur ce côté subalterne de la question et les arrangemens qui s’y rattachent que portent les objections. On ne comprend pas que, l’Italie formant un royaume uni, le pape y puisse conserver son indépendance. On se représente le souverain pontife sujet d’un roi ou d’un empereur. — Comment, demande-t-on victorieusement, serait-il indépendant le jour où il serait en lutte dans sa conscience avec les lois ou la politique de l’état au milieu duquel il vivrait ? — L’objection est fondée assurément : il fallait en conclure que le pape, en aucun temps, ne doit être sujet d’un prince ou d’un état ; mais cette conclusion naturelle, on l’a forcée. Le pape ne pouvant être sujet, on a dit : Il faut qu’il soit souverain, il faut qu’il ait une possession territoriale et un nombre de sujets assez considérable pour être à l’abri d’un coup de main. Ce raisormement était plausible dans un temps de barbarie où la force n’était