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LA
GRANDE REMONTRANCE
EPISODE DE L'HISTOIRE D'ANGLETERRE

Selon qu’elle est traitée par les esprits routiniers et serviles ou par ceux qui cherchent librement le vrai, l’histoire est une facile ornière ou un sentier ardu. Or les premiers, — nous ne l’apprenons sans doute à personne, — sont beaucoup plus nombreux que les seconds. Entre mille preuves qu’on en pourrait donner, nous citerions volontiers la paresseuse obstination avec laquelle tous les écrivains appelés à raconter Le règne de Charles Ier ont tour à tour copié la fameuse Histoire de la Rébellion, livre remarquablement écrit d’ailleurs, et qui occupe à bon droit dans la littérature anglaise la place que les Mémoires du cardinal de Retz ont dans la nôtre. Même talent d’exposition, même, vivacité de style les caractérisent, et, comme « peintre de portraits, » nous donnerions volontiers la palme à Clarendon. Par malheur, en fait d’exactitude, de loyauté, de désintéressement, ces deux hommes se valent. C’étaient deux politiques presque également rompus à l’intrigue, et dont les passions personnelles ont faussé de la manière la plus déplorable les témoignages à l’aide desquels ils sollicitaient la postérité de sanctionner leurs idées et d’absoudre leur conduite.

Clarendon fut un de ces renégats à qui les indulgences historiques sont trop aisément accordées. Il avait marqué aux premiers rangs du parti constitutionnel, quand il déserta tout à coup ce drapeau que la fortune semblait abandonner. Après avoir dissimulé