Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 39.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gets et de réserver scrupuleusement cette ressource pour les circonstances extraordinaires. D’ailleurs les plans de réforme économique intérieure ont été ajournés, et les charges nouvelles qui remplacent la réforme doivent, toutes compensations faites, excéder de 80 millions environ celles que la France supportait avant la conclusion du traité avec l’Angleterre[1]. Enfin d’un concours de causes diverses est née une crise industrielle et commerciale que les plus rassurés s’estimeraient heureux de ne voir ni s’aggraver ni s’étendre. C’est dans de telles circonstances que va s’ouvrir la discussion du budget. Que ces circonstances soient graves et que cette gravité soit comprise, c’est ce dont ne peut douter quiconque a suivi les dernières discussions de l’adresse. De grands devoirs sont donc imposés à tous : au gouvernement, qui se déclare prêt désormais à montrer plus de circonspection dans ses entreprises, moins de précipitation dans l’accomplissement de ses désirs, quelque utiles qu’il les juge; au corps législatif, qui doit se placer par son indépendance et sa fermeté à la hauteur de ce que le gouvernement lui demande et de ce que le pays espère; à tous ceux enfin qui, en quelque lieu et sous quelque forme que ce soit, discutent de si grands intérêts.


I.

M. Magne disait au corps législatif dans la séance du 18 mars 1861 : « Les finances de l’état ne peuvent être appréciées qu’à un point de vue comparatif, il n’y a rien d’absolu dans la situation financière d’un pays; on ne peut savoir si elle est bonne ou mauvaise qu’en la comparant soit à une autre époque dans le même pays, soit avec d’autres pays. » Ces comparaisons ont été de tout temps nécessaires; elles le sont plus que jamais aujourd’hui, car la nouvelle division du budget, la classification séparée des dépenses sur ressources spéciales (qu’on a fort improprement appelée un budget d’ordre)[2] pourraient accréditer de singulières erreurs

  1. Charges nouvelles 168,000,000 fr.
    Surtaxes des tabacs et alcools en 1860 50,000,000
    158,600,000 fr.
    A déduire : diminution des droits de douane par suite du traité avec l’Angleterre, ci 63,000,000 fr.
    — Dégrèvement de 1860 sur les sucres. 27,000,0000
    90,000,000
    Réduction sur les primes payées à l’exportation. 14,000,000 76,000,000
    76,000,000 fr. 82,000,000 fr.
  2. Exposé des motifs du budget de 1863, page 22. Les dépenses départementales et autres qui se trouvent classées dans cette nomenclature font peser sur les contribuables des charges tout aussi réelles que les dépenses qui passent par les mains de l’administration centrale.