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Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 40.djvu/595

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Madrid de leur déplaisir, et de ce moment leur correspondance ne cessa d’inquiéter leur cour sur le tour nouveau que prenaient à Londres les affaires, et d’imputer à Buckingham le travail hostile dont le mariage espagnol devenait évidemment l’objet.

La réponse de Philippe IV aux demandes du roi Jacques pour le rétablissement de l’électeur palatin fut telle qu’on pouvait et qu’on devait l’attendre d’après son attitude et son langage dans tout le cours de la négociation : il promit d’agir comme médiateur, et en y employant toute son influence, auprès de l’empereur Ferdinand II, il approuva qu’un terme fût fixé à cette médiation et parut en espérer le succès ; mais il se refusa à l’engagement de faire la guerre en Allemagne, de concert avec l’Angleterre, si les voies pacifiques ne réussissaient pas : « Par une telle menace, je sortirais, dit-il, de mon caractère de médiateur et d’arbitre dans l’affaire, et je donnerais à l’empereur mon oncle un juste motif d’offense, en manquant au respect que je lui dois. »

Jacques fut très perplexe ; il voyait approcher ce qui lui déplaisait le plus, la nécessité d’une résolution définitive, la ruine de ce mariage espagnol qu’il poursuivait depuis sept ans, et, à la suite de la rupture avec l’Espagne, peut-être la chance d’une guerre. Pour échapper à cette situation, il eût fallu que Jacquet domptât les prétentions obstinées de son gendre et les passions vindicatives de son favori : c’était plus de courage et d’autorité qu’il n’en avait. Dans son impuissance, il restait triste et presque solitaire à Newmarket, oubliant jusqu’à son divertissement habituel de la chasse, et ne recevant plus ses courtisans, même dans les jours de fêtes et d’hommages solennels. Il essaya de résoudre la question du Palatinat par une négociation directe avec le rival de son gendre, le duc Maximilien de Bavière ; un capucin alla et vint à plusieurs reprises d’Allemagne en Angleterre et des Pays-Bas en Hollande, pour amener les deux prétendans à des concessions mutuelles. Les ambassadeurs d’Espagne à Londres furent un moment inquiets de cette tentative, et demandèrent à Jacques une audience pour l’en entretenir : ils ne furent admis auprès de lui qu’à grand’peine, en présence de Buckingham, et sans succès. Mais le palatin détrôné et le duc de Bavière vainqueur se refusèrent également à tout accommodement efficace ; c’était toujours le parti protestant et le parti catholique aux prises et tous deux intraitables. Jacques, lassé, céda en hésitant toujours. Sans rompre ouvertement avec la cour de Madrid, il lui montra clairement qu’elle ne pouvait plus compter sur lui ; il rappela le comte de Bristol de son poste d’ambassadeur extraordinaire en Espagne, donnant ainsi satisfaction à la doublé haine de Buckingham, et retirant de Madrid le seul Anglais en qui les Espagnols