on annonça de par l’empereur que le jour suivant les députés hussites seraient conduits solennellement à l’église, et qu’ils communiqueraient au peuple, en langue tchèque, les compactats du concile. À ces mots, et sans attendre la cérémonie des actions de grâces, l’évêque catholique Philibert, dans un transport d’enthousiasme, entonna d’une voix retentissante un Te Deum laudamus, achevé par l’assemblée tout entière.
L’empereur, suivi des légats, se rendit alors à la cathédrale, où la messe fut dite en latin ; les hussites, chantant leurs hymnes en langue nationale, allèrent célébrer le service divin dans la maison qu’on leur avait assignée jusque-là. Tout le jour et toute la nuit, les cloches sonnèrent à pleine volée ; ce n’était partout que marques d’allégresse, maisons pavoisées, feux de joie, illuminations. Après tant de violences abominables, après tant de jours d’épouvante et d’horreur, il semblait qu’on vît enfin le commencement d’une ère nouvelle. Le concile de Bâle, avec son esprit de réforme, avait mis un terme à la révolution. « Réjouis-toi, sainte assemblée, — écrivaient ce jour-là même les légats du concile en adressant le récit de la fête à leurs commettans, — réjouis-toi et remercie le Seigneur ! Annonce à toute la terre ce jour de bénédictions, fais chanter les actions de grâces à tous les enfans de l’église ; il s’est levé enfin ce jour désiré où tu as recueilli les fruits de ton labeur, où tu en as chargé les corbeilles pleines sur les chariots de l’Éternel. C’est aujourd’hui qu’en face d’un peuple immense, en présence de l’empereur et au milieu de toutes les splendeurs impériales, le gouverneur, les barons, les nobles, les villes du royaume de Bohême nous ont remis les engagemens des compactats. Quelles paroles pourraient exprimer la joie qui débordait de tous les cœurs ? Visages rayonnans, regards mouillés de larmes, chants, cris de triomphe, ce n’était là que le faible témoignage de l’allégresse universelle. Pour nous, mettant notre bonheur avant toute chose dans la joie du saint concile et de la chrétienté tout entière, nous nous bornons à dire avec le Psalmiste : Il est juste de te glorifier, Seigneur ! Il est juste de chanter des hymnes à la gloire de ton nom, ô roi des rois ! »
On comprend aisément cette exaltation, si l’on songe aux guerres atroces qui avaient déchiré la Bohême : soit désir de voir renaître la paix, soit espérance d’écarter l’hérésie, les motifs de joie ne manquaient pas aux spectateurs de la fête d’Iglau ; mais si l’on se souvient des principes pour lesquels on se battait depuis vingt ans, il est impossible de ne pas apercevoir les plus singulières illusions dans les espérances des deux partis. La communion sous les deux espèces, l’usage du pain et du vin, de la coupe et de l’hostie, dans le sacrement eucharistique, était-il donc le seul objet de ces luttes acharnées ? Nous ne voulons pas, on le pense bien, remuer ici des