Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1862 - tome 40.djvu/985

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

éclaire l’âme, quand elle dirige les organes avec tant de spontanéité, de sûreté, de précision. Quand au contraire l’âme agit d’une manière indécise, laborieuse, inégale, c’est qu’elle se sert du λογισμός.

Stahl développe cette distinction avec beaucoup d’esprit. Considérant l’état de maladie, il compare l’âme, ce médecin presque infaillible qui travaille avec une énergie sûre d’elle-même à l’expulsion du principe morbide, à ces médecins indécis et maladroits, à ces raisonneurs qui, au lieu de surveiller du regard le mouvement réparateur de la nature, imaginent des maladies, raisonnent à perte de vue, prodiguent les remèdes et finissent par tuer le malade selon toutes les règles. C’est qu’ils se servent du λογισμός, tandis que la nature se sert du λόγος.

Tout cela est très ingénieux ; tout cela est-il solide et vrai ? Je ne cherche pas en ce moment à le savoir ; mais je constate que Stahl, cet esprit si hardi, cet animiste si convaincu, a au moins reconnu que les actes vitaux ne sont pas des phénomènes de conscience. Notre nouvel animiste est plus hardi que Stahl. Il veut d’abord que l’âme forme, gouverne et guérisse le corps, et de plus qu’elle ait conscience de faire tout cela. Voilà toute une révolution dans la science de l’homme. Toute barrière tombe entre la physiologie et la psychologie. La physiologie en effet est la science des fonctions vitales. Or, si les fonctions vitales, non-seulement émanent de l’âme pensante, mais tombent immédiatement sous la conscience, elles sont des fonctions psychologiques au même titre que les fonctions intellectuelles et celles de la volonté. Il n’y a plus en dehors de la psychologie, science générale de la vie, que l’anatomie ; encore pourrait-on soutenir que l’anatomie est une partie de la psychologie, car il est impossible que l’âme, agissant sur les organes les plus cachés avec conscience de son action, n’ait pas sur les tissus, les nerfs et les os, toute sorte de belles connaissances dont l’anatomiste grossier, qui n’a que ses yeux et son scalpel, ne manquera pas de profiter. C’est ainsi que le nouvel animisme, en exagérant l’union des deux sciences qui se partagent l’homme, est arrivé à les confondre, et, pour avoir voulu donner à l’hypothèse de Stahl une base dans les faits, en est venu à outre-passer le stahlianisme et à se mettre en contradiction flagrante avec l’expérience et le sens commun.


III

Nous avons fait ressortir quelques-unes des difficultés que rencontre l’animisme. On nous demandera peut-être si nous l’avons combattu dans l’intérêt d’un autre système. Vous ne voulez pas de