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mis après une longue délibération des deux gouvernemens, le mot infâme de liberté, appliqué aux catholiques romains, avait été subrepticement introduit par les suggestions et l’artifice de M. de La Ville aux Clercs, » et il conjura le duc de Buckingham de lui faire donner l’ordre d’en demander la suppression, faisant ainsi lui-même ce qu’il reprochait au pape, car il prétendait retirer ce qui avait été convenu et signé six mois auparavant, comme le pape prétendait l’amplifier.

Les méfiances du comte de Carlisle envers le gouvernement français n’étaient point fondées; il n’y avait nul concert entre les cours de Paris et de Rome pour ces exigences nouvelles, et Richelieu était aussi impatient que le roi Jacques de voir le mariage conclu aux conditions déjà acceptées des deux parts. Pressé et tiraillé par des passions et des prétentions contraires, il les traita, les anglaises comme les romaines, en politique à la fois résolu et prudent, qui ne s’emporte ni ne s’intimide, et qui marche à son but en ménageant ceux qu’il y veut conduire, mais sans leur céder. Il avait à tenir compte des sentimens du pape et des catholiques aussi bien que le roi Jacques des sentimens du parlement et des protestans. Il envoya à Londres le fils du secrétaire d’état La Ville aux Clercs, Henri de Loménie, comte de Brienne, avec la mission de tâcher d’obtenir ce que désirait la cour de Rome, c’est-à-dire « un acte scellé du grand sceau d’Angleterre qui assurât la condition des catholiques anglais, et que les enfans qui naîtraient du futur mariage, lors même que le prince Charles parviendrait à la couronne, seraient élevés dans la religion catholique et romaine jusqu’à ce qu’ils eussent atteint l’âge de treize ans, » et en même temps il donna au comte de Béthune l’ordre de déclarer à la cour de Rome que, « bien décidé à ne pas rompre avec l’Angleterre, et ne lui restant aucun autre moyen d’empêcher cette rupture, il avait pensé devoir promettre, dans un mois, l’accomplissement du mariage dont il avait déjà plu à sa sainteté accorder la dispense, se réservant ce temps pour obtenir de sa sainteté ordre exprès à son nonce de la délivrer sans autre condition que les pièces qui lui seraient délivrées par son ambassadeur, et celles qu’il devait mettre ès-mains du nonce, selon les formes prescrites par sa sainteté, hors ces articles latins, signées par le roi de la Grande-Bretagne. »

Mise ainsi au pied du mur et aussi décidée à ne point rompre avec Richelieu que Richelieu à ne pas rompre avec l’Angleterre, la cour de Rome renonça à ses additions latines, et le 6 janvier 1625 le père de Bérulle écrivit au cardinal : « Monseigneur, il y a un mois que je suis sur mon partement; mais il nous a fallu autant de soins et autant de congrégations sur les écritures et expéditions comme sur le fond et la substance de l’affaire... C’est ici la condi-