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condamnés, malgré leur vocation commerciale, à habiter une ville de guerre, ils ont bien tort de s’en prendre à leur gouvernement ; c’est tout simplement la faute de la nature, qui a fait des lieux où s’est élevée et a prospéré leur cité une des fortes positions militaires du continent. S’ils étaient détachés un jour de la petite et libre nation dont ils sont une des portions les plus intéressantes, s’ils étaient destinés à faire partie d’un grand état, ils peuvent être certains qu’Anvers serait plus que jamais place de guerre, que ses fortifications actuelles, au lieu de tomber, recevraient toute sorte de complémens, et qu’ils n’auraient pas même la consolation de siffler injustement leur honnête bourgmestre. E. FORCADE




REVUE MUSICALE.



Les concerts populaires de musique classique fondés l’année dernière viennent de se rouvrir, et le public nombreux qui avait encouragé une si belle entreprise est revenu à l’appel qu’on lui a fait ; tous les dimanches, il remplit la grande salle du Cirque-Napoléon qui contient quatre mille personnes. L’empressement est si grand, que de pauvres ouvriers apportent d’avance leurs économies pour être plus sûrs d’assister à une si noble fête de l’âme et de l’esprit.

La première série des concerts populaires a commencé le 19 octobre, et se continuera jusqu’à la fin de la saison. Les programmes sont toujours composés avec un grand scrupule, et les œuvres qu’exécute l’orchestre dirigé par M. Pasdeloup sont des œuvres consacrées par l’opinion et par le temps. Ce sont des symphonies d’Haydn, Mozart, Beethoven, Mendelssohn, des ouvertures de Weber et d’autres maîtres allemands, qui dominent nécessairement dans des concerts consacrés à la musique instrumentale. C’est la musique limpide d’Haydn, puis celle de Mozart, qui plaisent surtout à ce public où sont représentées toutes les classes de la société, et il faut voir avec quel enthousiasme sont accueillies certaines pages d’une beauté placide et touchante. Le génie de Beethoven est sans doute plus difficile à comprendre, et les artistes eux-mêmes n’ont pas encore acquis la fermeté nécessaire pour rendre une conception aussi vaste que la symphonie héroïque par exemple. On doit reconnaître cependant que l’orchestre, relativement peu nombreux, a fait des progrès depuis l’année dernière, et que, malgré les inconvéniens d’une salle énorme qu’on n’avait point construite pour y faire de la musique, cet orchestre s’anime de plus en plus et marche sur les traces de la société du Conservatoire, qui est la première du monde. Il serait profondément injuste de comparer ces deux institutions musicales, dont l’une existe depuis trente-cinq ans et se compose des premiers artistes de Paris. M. Pasdeloup n’a pas la folle prétention qu’on lui prête, et il sait fort bien que l’œuvre qu’il essaie d’accomplir est toute différente