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gnons ; leurs anciens rêves ne tardent point à s’évanouir ; il faut travailler et travailler dur pour découvrir le rare métal. Les montagnes d’or, ainsi que les îles de diamans, n’existent que dans les pantomimes anglaises de la Christmas. La nature a voulu qu’à Cariboo même l’homme gagnât son pain à la sueur du front. Pour nous faire une idée de ces travaux, il est nécessaire de remonter à la formation et en quelque sorte à l’histoire naturelle de l’or. Au moment des merveilleuses découvertes de l’Australie, les professeurs du Museum of practical geology ouvrirent à Londres un cours public pour les ouvriers qui se proposaient de prendre part au butin, et certes leurs leçons n’ont point été stériles, car les théories de la science se rattachent ici d’une manière intime aux pratiques des mineurs.

Parmi les zones de terrains si nombreuses formant l’écorce de notre globe, il n’en est qu’une où l’or se soit jamais présenté en quantité notable : c’est celle que les géologues désignent sous le nom de roches siluriennes. Ces roches sont très anciennes dans l’histoire de la nature, et pourtant, s’il faut en croire sir Roderic Murchison, l’or, du moins sous sa forme actuelle, serait un produit assez récent des dernières révolutions de notre planète. Sir Roderic veut dire par là que l’or existait sans doute déposé à l’état diffus à travers la masse des roches siluriennes depuis leur origine, mais qu’il ne s’est réuni en veines, en cordons et en cristaux que beaucoup plus tard et à une époque relativement peu éloignée. Quelle est maintenant cette époque ? Le savant géologue anglais croit pouvoir la fixer un peu avant les vastes dénudations de terrains qui eurent lieu presque partout à la surface de notre globe, et durant lesquelles les grands mammifères périrent. Dans les chroniques de la nature, l’âge d’or ne serait donc point au commencement des temps, ainsi que dans les fables des poètes, mais presque à la fin de la dernière période. Quelle est toutefois la cause qui a fondu et aggloméré les molécules aurifères dans le creuset des roches siluriennes ? On ne peut guère la rapporter qu’à ces grandes actions chimiques de la nature connues sous le nom de forces métamorphiques, et dans lesquelles la chaleur et l’électricité combinées avec la vapeur d’eau ont vraisemblablement joué un rôle. Tout annonce en effet que le métal liquide s’est répandu et ramifié en veines dans l’épaisseur de la roche dure, tandis que le quartz, qui sert surtout aujourd’hui de matrice à l’or, était lui-même à l’état mou quand il a rempli les cavités. Cette théorie explique bien la présence de l’or dans les anciennes masses ardoisières et les filons de quartz ; mais comment se fait-il que le précieux métal se trouve aussi et même en grande abondance dans certains terrains d’alluvion, tels que les vallées, le bord des rivières et le