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Le commandant de la province reçut l’ordre de le faire arrêter et enfermer au fort Brescou. La commission intermédiaire écrivit aussitôt dans les termes les plus pressans au ministre pour demander sa mise en liberté, et invita le nouvel archevêque de Lyon, M. de Marbeuf, à l’appuyer dans ses instances. Dès le retour de Necker au ministère, la détention de M. Barou fut convertie en un exil dans sa terre du Soleil ; mais, la commission ayant insisté pour obtenir sa liberté pleine et entière, il revint prendre séance avec ses collègues, qui applaudirent à son retour.

La commission continua à tenir ses séances jusqu’au 30 juin 1790. Parmi les affaires dont elle eut à s’occuper, on trouve une concession faite par le gouvernement au marquis d’Osmond des houillères de Roche-la-Molière et lieux circonvoisins, dans les environs de Saint-Étienne. La commission s’éleva contre le principe même de la concession, comme contraire au droit de propriété et comme devant faire renchérir le charbon de terre. La concession de Roche-la-Molière et Firminy, la plus étendue du bassin de la Loire, n’embrassait pas moins de quatre lieues carrées ; elle donnait lieu à un procès avec les propriétaires du sol, qui n’était pas encore jugé en 1789.


VI. — DAUPHINÉ.

Voici enfin, pour terminer cette longue énumération, la province qui fit échouer l’institution des assemblées provinciales, et qui mit à la place un mouvement plus radical, prélude et signal de la révolution. La généralité de Grenoble, ancienne province du Dauphiné, comprenait les trois départemens actuels de l’Isère, de la Drôme et des Hautes-Alpes. Elle se divisait en six élections, qui avaient pour chefs-lieux Grenoble, Vienne, Romans, Valence, Gap et Montélimart. Le tout forme aujourd’hui onze arrondissemens[1].

Réuni à la couronne par traité et non par conquête au milieu du XIVe siècle, le Dauphiné avait conservé pendant trois cents ans une indépendance effective et des états particuliers. Depuis Louis XIII, les états étaient suspendus, mais non abolis, et la province n’avait cessé d’en réclamer le rétablissement. On lui donnait une satisfaction nominale en conservant le titre de dauphin, que portait l’héritier de la couronne ; mais là se bornait la reconnaissance de ses anciens droits. Cet oubli des engagemens les plus sacrés y entretenait une constante irritation : on n’y obéissait qu’en frémissant aux intendans nommés par le roi, et on n’y acquittait les impôts que

  1. Les nouveaux chefs-lieux sont Saint-Marcellin et La Tour-du-Pin dans l’Isère, Die et Nyons dans la Drôme, Briançon et Embrun dans les Hautes-Alpes ; Romans n’est plus qu’un chef-lieu de canton.