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Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 45.djvu/859

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Les chambres appelées cubicula, qui donnent sur les galeries ou qui les interrompent, sont des cryptes ou chapelles de forme diverse ; la plupart sont des quadrilatères d’environ trois mètres de côté. Au milieu, une sorte de rond-point en coupole ; au fond, une tombe en travers sous une niche en arceau nommée arcosolium ou opus arcuatum. Dans les chambres un peu grandes, il y a plusieurs sépulcres et des sièges ou cathedrœ ; quelquefois des bancs sont taillés dans le tuf. Les tombeaux, en forme de caisse quadrangulaire, arca, sont recouverts d’une plaque de pierre ou de marbre, mensa, et affectent plus ou moins la forme des sépulcres antiques. Dans ces celles, près de ces restes révérés, l’office divin réunissait souvent les fidèles ; l’agape ou plutôt la cène, au lieu d’être célébrée sur une simple table, l’était sur celle du tombeau même. Les protestans expliquent que par ce seul changement la commémoration de la dernière pâque est devenue le sacrement de l’autel ou la messe. La forme sépulcrale de nos autels attesterait cette origine. S’il fallait en croire Anastase, écrivain de peu d’autorité, ce qui nous semble s’être établi ainsi par l’usage aurait été réglé formellement, vers la fin du IIIe siècle, par le pape saint Félix.

Il est probable que la disposition générale des lieux est d’origine hébraïque. Les Juifs, assez nombreux à Rome, auront commencé par suivre, dans l’inhumation de leurs morts, l’usage de Jérusalem, dont la montagne est toute perforée, le sol tout miné par des excavations funéraires. On a comparé l’église romaine primitive à une confédération de républiques grecques avec de fortes traces de judaïsme. Aux premiers temps surtout, l’esprit de l’Ancien Testament devait se mêler à l’esprit du Nouveau dans les rites comme dans la foi. On montre près de l’inscription grecque de la tombe d’une certaine Faustine, nom romain, l’image du chandelier à sept branches. Une autre épitaphe est celle d’un Juif du nom de Moïse. Le mot hébreu shalom remplace quelquefois celui de pax, si commun sur les moindres tombeaux. Quand les chrétiens ont-ils commencé à se créer des asiles à part ? On l’ignore. La plus ancienne inscription avérée est de l’an 102 ou 107, trouvée dans le cimetière de Lutine, celle de 71, par laquelle commence le recueil de M. De Rossi, n’offrant pas un caractère certain ni une origine assurée[1]. Les dates ne sont pas toujours faciles à fixer. En général, suivant le père Marchi lui-

  1. Les inscriptions chrétiennes antérieures à Constantin, et dont la date est attestée par des signes certains, sont au nombre de trente et une, comprises entre les années 71 et 310. La première, qui est bien de 71, n’a rien de décidément chrétien. Il est dit vaguement qu’elle a été trouvée dans ces cimetières souterrains. Voyez le bel ouvrage intitulé Inscriptiones christianœ urbis Romœ septimo sœculo antiquiores, edidit J.-B. De Rossi. Rome 1861.