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longtemps confondu avec les dépendances de la Platonia, il n’a été bien étudié que dans ces derniers temps et distingué sous le titre de crypte des papes, parce qu’il contient dans un espace resserré les tombes d’un assez grand nombre de pontifes du IIe et du IIIe siècle, dont la liste est donnée par une inscription du pape saint Damase. Des peintures dont la manière est plus antique que byzantine nous montrent comment les premiers peintres chrétiens de Rome concevaient la représentation des scènes de l’Écriture. C’est là qu’on a trouvé le portrait d’un fossoyeur avec ses outils, et cette inscription : Diogenes fossor in pace depositus octobri kalendas octobris (sic). Une double chambre ou chapelle est datée par un fragment en vers incorrects, qui nous apprend que le diacre Sévère y est enseveli, et qu’il l’avait fait exécuter avec des arcosolia et un soupirail, pour obéir à l’ordre du pape Marcellin (entre 295 et 304), jussu papœ sui Marcellini. C’est peut-être la seule fois que le nom de pape se lit dans les catacombes ; mais il n’a évidemment que ce sens de paternité qui le rendait commun à tous les évêques, ou du moins à d’autres que l’évêque de Rome.

Mais la plus intéressante peut-être des découvertes faites dans les catacombes est celle dont la place est voisine, et qui a prouvé par un récent exemple tout ce que ces lieux funèbres peuvent encore cacher de trésors à l’archéologie chrétienne.

Peu de saintes sont aussi populaires que sainte Cécile. Elle est devenue toute poétique grâce au pinceau de Raphaël. C’est la sainte des artistes. Sur la foi d’un récit qui ne paraissait nullement historique, elle a passé de tout temps pour une jeune fille qui habitait une riche demeure dans le Trastevere. Mariée à un noble romain, Valérien, qui mourut pour la foi comme elle, on disait qu’elle avait donné tout son bien aux pauvres et voulu que sa maison fût une église. La basilique qui lui est dédiée devait en occuper l’emplacement, et l’on montre près de l’entrée une chapelle qui serait la chambre des bains où la jeune martyre aurait péri au commencement du IIIe siècle. Cette basilique très ancienne, puisqu’on la fait remonter à l’an 230, a été rebâtie au XVIe et même au XVIIIe siècle. Elle dépend d’un couvent de bénédictines qui l’entoure, et dont il faut traverser la cour pour arriver à l’église. En y entrant le jour de Noël, je la trouvai vide ; les religieuses, cachées par des grilles dans un triforium, chantaient sans se laisser apercevoir. Dans une crypte, deux urnes couvertes, qui ressemblent à des fonts baptismaux, passent pour avoir servi à recevoir le sang des martyrs. On en montre une tachée du sang de Cécile. Sa statue est couchée sous l’autel. C’est celle d’une très jeune fille dans ses habits de mort, la face à demi retournée vers la terre, la tête étant comme remise à sa