Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/1018

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Glenquoich. M. Ellice faisait le plus noble usage de sa fortune. Il était toujours prêt à venir en aide à un ancien ami tombé dans le malheur, à encourager le mérite encore obscur, à soulager les infortunes imméritées. On ne saura jamais tous les bienfaits qu’il a répandus avec la plus noble délicatesse. Honoré, aimé de tous, il était parvenu à l’âge de quatre-vingts ans sans aucune infirmité, sauf quelques attaques de goutte. Il disait souvent qu’il avait été toujours heureux. Il n’ajoutait pas qu’il avait toujours mérité de l’être. Une mort soudaine, exempte de toute souffrance, a couronné sa belle et longue vie On peut appliquer à M. Ellice ce que M. Mignet a dit de Franklin : « Sa vie constamment heureuse est la plus belle justification des lois de la Providence. »


PROSPER MERIMEE.


Histoire de Nice et des Alpes-Maritimes, par M. Fervel[1].

A peine annexé à la France, le comté de Nice est déjà le sujet d’une intéressante monographie. M. le colonel Fervel ne s’est point borné à extraire les récits enfouis dans les compilations italiennes; il a parcouru le pays dans tous les sens, et il le décrit non point seulement avec la précision qui convient à un officier du génie, mais encore avec la passion de l’érudit et de l’antiquaire, qui recherche l’origine des vieux monumens, évoque tous les souvenirs, et interroge tous les sillons. Et en effet que d’événemens se sont accomplis, combien d’hommes, et des plus illustres, ont passé sur ce petit coin de terre, à commencer par Hercule, fondateur de Monaco et de Villefranche ! Dans sa longue carrière de plus de vingt et un siècles, Nice, fondée et baptisée du nom de Victoire (Nikê) par les riches colons de Marseille, s’est vue mêlée aux plus grands événemens de l’histoire. Conquise par César, elle a pris part aux sanglantes luttes de Rome contre les Barbares. Au moyen âge, elle a successivement reconnu la domination de la maison d’Anjou, de la maison d’Aragon, de la couronne de Savoie, défendant toujours ses institutions républicaines et ses franchises municipales, fière de son commerce, de son luxe, de sa civilisation, reflets lointains, mais ineffaçables, du génie de la Grèce, qui l’avait éclairée à son berceau. Plus tard, lorsque l’Europe était toute remplie par la rivalité de François Ier et de Charles-Quint, Nice a reçu dans ses murs les deux monarques et le pape Paul III, leur impuissant médiateur. Ville de guerre de premier ordre, elle a soutenu presque à chaque siècle des sièges mémorables; elle a repoussé les Turcs, elle s’est défendue contre les armées de Louis XIV. Aucun genre de gloire, aucune épreuve ne lui a manqué, et chacune de ces péripéties se rattache aux événemens les plus importans de l’histoire de l’Europe.

Tous ces faits, avec les épisodes qui leur appartiennent, sont retracés par M. le colonel Fervel dans la monographie qu’il a consacrée au comté de Nice. Il nous suffit d’avoir indiqué le sujet des principaux chapitrés pour signaler l’intérêt que présente ce travail, où se rencontrent souvent, à côté des récits de la chronique, les sérieuses appréciations de l’histoire.


c. LAVOLLEE.

  1. Paris, Hetzel et Dumaine, 1862.