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que le mystère s’explique. Les places et les rues sont littéralement encombrées de petits fromages ronds empilés comme des boulets dans les arsenaux. En 1860, on a vendu à Alkmaar 4,363,885 kilos de fromage, à Horn 2,882,679, à Purmerend 1,771,387, à Medemblik 778,065, à Enkhuizen 739,788, et dans toute la Nord-Hollande environ 12 millions de kilos représentant une valeur d’environ 15 millions de francs. Arthur Young, visitant la Lombardie, se rendit un soir au théâtre de Pavie. À la lueur de mille bougies, il vit dans toutes les loges des dames richement vêtues et parées de diamans aux feux étincelans. Se rappelant ses courses de la matinée, des prairies, se dit-il, des vaches, du lait et du fromage, voilà ce qui produit toute cette richesse. Le même mot peut s’appliquer à la Hollande, avec cette différence qu’ici une grande partie des profits réalisés dans les campagnes y reste et y répand le bien-être, au lieu d’aller alimenter le luxe des villes.

Dans cette région fertile, où le sol, souvent arrosé par suite de l’humidité du climat, produit spontanément une herbe abondante, les travaux du cultivateur ne sont pas très compliqués. Un peu plus de la moitié des prairies est consacrée au pâturage ; le reste est réservé pour faire du foin. Sur les 141,270 hectares de prés que possédait la Nord-Hollande en 1855,73,734 étaient pâturés et 67,536 fauchés. En général, le même pré est alternativement fauché et pâturé ; mais il est certaines parties de terre que l’on doit cultiver pendant quelques années pour extirper une plante qu’on dit très nuisible au bétail. Cette plante est une espèce de prêle, l’equisetum palustre, et on appelle les terres qui en sont infestées unjerland ; elles ont beaucoup moins de valeur que les autres. La culture éloigne pour quelque temps la plante maudite ; mais on parvient rarement à l’extirper complètement ; elle reparaît quand le champ est remis en herbage ; peut-être en viendrait-on à bout au moyen d’une large application de chaux. Conserver de bon foin est ici la question capitale, puisque l’entretien du bétail en dépend durant les six mois d’hiver, où l’on ne peut leur procurer d’autre nourriture. Sur cet important objet, les opinions diffèrent ; les uns prétendent qu’il vaut mieux mettre le foin en meule, comme en Angleterre et en Belgique ; d’autres soutiennent qu’il faut le rentrer dans un fenil bien clos : c’est ce que l’on fait dans la Nord-Hollande. Dans la Hollande méridionale, on a adopté un système mixte qui mérite d’être signalé. Un toit mobile est supporté par quatre grands montans en bois solidement fichés en terre et percés de distance en distance de trous horizontaux. On soulève et on abaisse à volonté le toit retenu autour des montans au moyen de grands anneaux de fer, et on le fixe à la hauteur voulue en passant des barres de fer à travers les trous des montans. Les meules abritées sous ce toit sont garanties