Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

convention faite entre les deux amis eut son effet. Daniel venait de rentrer un soir dans sa chambre et se mettait au lit, quand il vit soudain une masse noirâtre obscurcir la clarté de la lune, puis une lumière se dégager de ce brouillard, non point une lumière ordinaire, mais une lumière dont le livre des Révélations signale la nature toute spéciale; ce n’était rien moins en effet que la lueur que les esprits répandent ordinairement autour d’eux. L’enfant vit alors, au pied de son lit, l’image lumineuse d’Edwin, dont « la figure était plus nettement dessinée que si la vie l’eût animée. » Le fantôme leva son bras droit vers le ciel, fit trois cercles dans l’air et s’évanouit. Cela indiquait suffisamment qu’il était mort depuis trois jours, à pareille heure, et c’est ce qu’une lettre vint bientôt confirmer.

Lo jeune Daniel tenait de race. Sa mère, ainsi qu’il nous l’apprend, était une voyante. En cette qualité, elle connut qu’elle devait mourir prochainement, et en avertit son fils. Un jour, Daniel avait alors dix-sept ans, il eut un violent pressentiment que sa mère désirait le voir. Il habitait avec la tante qui l’avait adopté, mais sa mère était à douze milles de là. Il courut donc jusqu’auprès d’elle, et celle-ci, comme ayant conscience du motif qui amenait son fils, lui raconta la vision qu’elle venait d’avoir. « Votre petite sœur Mary (morte précédemment) m’est apparue, lui dit-elle, tenant quatre lis dans sa main. Après les avoir laissés glisser entre ses doigts l’un après l’autre, elle me dit, quand le dernier eut quitté sa main : — Et alors vous viendrez à moi ! — Je lui demandai si les quatre lis signifiaient des années, des mois, des semaines ou des jours, et elle me répondit : — Mois ! » Il est inutile de dire que cette prédiction s’accomplit ponctuellement. Daniel, qui, malade et alité, n’avait pu se rendre auprès de sa mère, apprit immédiatement par une apparition qu’elle avait quitté la terre, tandis que sa famille n’en fut instruite qu’une demi-heure plus tard par un télégramme.

Tels furent les débuts du spirite écossais, qui ne manquent point d’une certaine grâce sous la forme où il nous les présente. Cependant sa tante s’inquiétait de ces imaginations maladives; elle cherchait à calmer son neveu, sans pouvoir y parvenir. Ce fut bien pis quand les meubles se mirent à craquer et que le jeune Daniel commença d’entendre dans les tables des craquemens significatifs. La bonne dame, y voyant l’œuvre des démons, appela pour ramener le jeune homme à la raison les trois ministres du village, dont l’un était congrégationaliste, l’autre anabaptiste, et le troisième wesleïen. Tous trois y perdirent leur latin, et les tables de tourner et de se promener de plus belle. « Une fois, dit M. Home, pendant qu’une table était ainsi en mouvement, ma tante prit la bible de famille et la plaça sur le meuble, espérant qu’ainsi elle chasserait le démon; mais, à son grand étonnement, la table s’agita d’une manière plus