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Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/782

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à la porte Saint-Honoré, où la Rue-Royale, nouvellement ouverte, terminait Paris, les boulevards intérieurs n’étaient bordés que d’un simple rang d’habitations. Aucun des quartiers de l’Opéra, de la Chaussée-d’Antin, des Martyrs, Saint-Lazare et Saint-Honoré n’existait encore. Le plan de 1800 contient les noms de quelques-unes des rues aujourd’hui si populeuses de ces circonscriptions; mais elles restaient alors à l’état de véritables chemins ruraux, bordés par des haies ou par les jardins qui entouraient de luxueuses maisons d’été. Le faubourg Montmartre, la Nouvelle-France, les Porcherons et la Ville-l’Évêque formaient de véritables faubourgs, comme étaient il y a quatre ans les communes suburbaines, sans pouvoir cependant être comparés en rien à ces villes industrielles que l’annexion de 1859 a réunies à Paris.

Dans ce Paris de 1800, aussi vaste que celui de 1850, mais où d’immenses emplacemens restaient inoccupés, et qui ne renfermait pas plus de six cent mille habitans, les conditions de la viabilité, de la salubrité, de l’hygiène publique en un mot, différaient singulièrement de l’état actuel. M. Horace Say, dans son livre sur l’administration de la ville de Paris, disait qu’on trouverait peut-être difficilement, même dans les pays méridionaux de l’Europe, une bourgade aussi arriérée sous certains rapports que l’était Paris il y a trois siècles; or en 1800 la ville n’avait guère changé. Le régime des eaux, l’état des chaussées, l’accumulation des immondices et des boues, l’absence d’éclairage, faisaient toujours de la capitale de la France un séjour insalubre et incommode, d’autant plus qu’elle était mal construite et irrégulièrement percée. Montesquieu disait que les maisons de Paris étaient en l’air et interceptaient le jour. La ville entière devait être reconstruite, comme lé prouve la déclaration du roi du 10 avril 1783, qui fixait un minimum de largeur pour les rues, un maximum de hauteur pour les bâtimens, et ordonnait la levée d’un plan général de Paris afin de rectifier les rues tortueuses et de rebâtir les maisons. La levée de ce plan, concédée à forfait au commissaire-général de la voirie Verniquet, interrompue pendant la révolution, est rentrée en 1823 dans les attributions de la municipalité. Toutes les décisions ultérieures d’alignement ont été prises d’après ses indications. On peut remarquer que depuis six cents ans le système de la voirie de Paris n’a pas été modifié. Déjà sous Philippe-Auguste deux grandes voies de communication, correspondant aux quatre portes Saint-Denis, Saint-Jacques, Saint-Antoine et Saint-Honoré, coupaient la ville de l’est à l’ouest et du nord au sud. Aujourd’hui le boulevard de Sébastopol et la rue de Rivoli forment encore- ce qu’on appelle la grande croisée de Paris.