pouvait les craindre, et lorsqu’il se vit menacé par l’occupation d’Hérat livrée aux Persans, lorsque sa frontière occidentale lui parut compromise, il n’hésita pas à solliciter les secours du gouvernement britannique. Ses ouvertures ne pouvaient être repoussées, puisqu’elles offraient l’occasion d’effacer de fâcheux souvenirs, de renouer avec les Afghans les bons rapports si gratuitement détruits par les imprudences de lord Auckland, et de créer ainsi une barrière de plus sur cette route des Indes que l’ambition moscovite (à ce qu’on croit du moins) fait explorer par la Perse en attendant le jour où elle pourra s’y lancer elle-même. L’émir, invité à Peshawur[1], s’y rendit auprès de sir John Lawrence, lieutenant-gouverneur du Pendjab et pays adjacens; là fut conclu entre ces deux personnages un véritable traité d’alliance offensive et défensive contre la Perse, ennemie commune des deux états. Pour mettre l’émir à même de lever et d’entretenir une armée qui pût chasser les forces persanes jetées dans Hérat, un subside mensuel d’un lack de roupies (250,000 francs environ) lui fut libéralement alloué, mesure excellente lorsqu’elle fut prise, mais qui devint bien plus essentielle encore au moment de la grande révolte qui allait la suivre de si près. Alors en effet Dost-Mohammed, sollicité, pressé, assiégé de mille provocations, put se croire un instant l’arbitre des destinées de l’Inde. Quelle importance redoutable n’aurait pas prise le rôle de l’émir, s’il avait mené ses hordes belliqueuses au secours du grand-mogol assiégé dans Delhi par des forces manifestement insuffisantes? Mais Dost-Mohammed n’était pas seulement l’obligé, il était le pensionnaire de ses amis de la veille, qui, la guerre persane achevée, s’étaient bien gardés de casser aux gages un allié de cette importance. La crainte seule n’eût peut-être pas maintenu sa fidélité chancelante. Jointe à la cupidité satisfaite, elle lui donna la force de résister à l’impulsion qu’il recevait de toutes parts et d’ajourner les déterminations hasardeuses auxquelles l’irritation populaire semblait le convier énergiquement.
Dans ce traité de janvier 1857, une stipulation particulière réglait l’envoi d’une mission militaire anglaise qui, sous la protection de l’émir, surveillerait les mouvemens des forces persanes, tiendrait les autorités du Pendjab au courant de tous les incidens militaires survenus à la frontière occidentale de l’Afghanistan, et veillerait enfin au bon emploi des subsides, fournis pour un but essentiellement déterminé. La mission partit de Peshawur le 13 mars 1857, sous les ordres du major Lumsden, organisateur et chef du corps des guides, joignit le 20 du même mois, sur les bords de la rivière Kurram, l’escorte que l’émir avait envoyée au-devant d’elle, franchit,
- ↑ On suit ici l’orthographe anglaise pour les noms propres; on prononce Pichaour.