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le 13 juin 1863, qui proclamaient roi sous le nom de George Ier le second fils de l’héritier de la couronne de Danemark, un parlement extraordinaire avait été convoqué à Corfou pour déclarer si les Ioniens persistaient dans leur volonté de s’unir à la Grèce, et pour prendre les mesures nécessaires à la réalisation de cette volonté.

Nous avions appris, avant de quitter Athènes, le résultat des élections, le mandat donné dans toutes les îles aux députés de voter pour « l’union absolue, immédiate, complète et sans conditions, » et les démonstrations patriotiques qui avaient marqué le mouvement électoral. Nous savions que le parlement ionien était déjà réuni depuis plusieurs jours pour décider la grande question. Chacun avait donc hâte d’arriver à Corfou, car le vote de l’union et les fêtes qui devaient l’accompagner promettaient un intéressant spectacle.

Aussitôt que nous eûmes rempli les innombrables formalités de santé et de police auxquelles les Anglais ont astreint les voyageurs qui arrivent à Corfou, nous apprîmes des bateliers du port que nous venions trop tard pour assister au vote d’union, qui avait été rendu la veille au milieu de l’enthousiasme universel, mais que le parlement allait se réunir de nouveau pour porter le décret au lord haut-commissaire. On conçoit que notre premier soin fût de courir au parlement : il était déjà rassemblé, et le secrétaire lisait le procès-verbal de la séance de la veille.

Avant d’aller plus loin, il est bon de donner sur la composition de ce parlement quelques détails qui seront nécessaires à la suite de ce récit. En consentant à laisser les Iles-Ioniennes s’annexer à la Grèce, le gouvernement anglais pensait consolider son influence dans ce pays, si petit et si faible au point de vue matériel, mais dont l’action morale est très grande, et avec lequel il faut toujours compter dans les affaires du Levant ; seulement il craignait avec juste raison les obstacles qui pourraient venir des Iles-Ioniennes elles-mêmes. Quarante-neuf ans de domination anglaise n’ont pas fait des Ioniens les amis de l’Angleterre. Dans les premiers mois qui avaient suivi la révolution d’Athènes, ils avaient, seuls parmi tous les Grecs, résisté à l’entraînement alfrédiste, bien qu’on promît déjà d’accomplir l’union, si le prince Alfred était élu.

Le parlement régulier, dont l’existence devait durer trois années encore, avait, et d’après la constitution ionienne et d’après le mandat que lui avaient donné ses électeurs, des pouvoirs suffisans pour répondre à la question posée par l’Europe ; mais l’attitude prise par ce parlement dans les années précédentes, les luttes qu’il avait soutenues contre le lord haut-commissaire n’étaient pas de nature à rassurer le gouvernement anglais. Le cabinet de Londres désirait