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que ce sont ces populations primitives qui ont autrefois occupé toute l’Europe occidentale, et qui ont dressé aussi les pierres de Karnac en Bretagne et celles de Stonehenge en Angleterre.

La partie occidentale de l’Over-Yssel est occupée par un district qui a quelques rapports avec la Drenthe. C’est la Twenthe, dont le nom semble avoir avec celui de cette dernière province une sorte de concordance qui a beaucoup occupé les étymologistes, sans qu’ils soient arrivés à une explication très satisfaisante. On retrouve encore ici la marke avec son essch ; mais la facilité plus grande des communications et l’industrie qui s’est fixée dans cette région, à Almelo, à Enschede surtout, ont chassé les anciennes coutumes et le travail en commun. Cependant la culture se rapproche encore beaucoup de celle de la Drenthe : c’est aussi une succession non interrompue de céréales. On a même supprimé ici la demi-jachère que permet là-bas le sarrasin. On met sur la même terre du seigle pendant dix ou douze ans de suite, puis après une récolte de pommes de terre on recommence. Bien qu’on semble méconnaître ainsi à plaisir les plus instantes prescriptions de la science agronomique, qui défend de demander trop souvent la même récolte à la même terre, la quantité ni la qualité du grain ne semblent diminuer, et le seigle de la Twenthe est renommé dans toute la Néerlande. Lorsqu’on visite le pays, on est étonné de la vigueur de la plante, de la hauteur et de la force de la paille, de la grandeur de l’épi, et c’est vraiment un beau spectacle que cette mer de seigle dont les vagues ondoient sous la brise, surtout, comme disent les paysans de ce district, quand la précoce céréale répand au vent les effluves de son pollen, qui pénètre l’air d’un parfum de vivifiante fécondité. Le miraculeux succès du détestable assolement suivi ici s’explique, comme dans la Drenthe, par l’énorme quantité de mottes de gazon et de bruyère qu’on amène chaque année sur la terre labourée. Il n’en est pas moins vrai que cette rotation est mauvaise, qu’elle exige beaucoup de travail, et qu’elle n’est possible qu’en maintenant une partie du sol en friche. Cet exemple est cependant utile à signaler, car il montre à quel degré de fertilité on peut maintenir la terre, quand on a soin d’ajouter à l’engrais de ferme toutes les matières végétales qu’on peut se procurer aux alentours.

Si la culture de la Twenthe ne marque guère de progrès sur celle de la Drenthe, nous pourrons au contraire constater une grande amélioration en pénétrant dans le Salland, district sablonneux aussi qui s’étend vers l’ouest jusqu’aux bords de l’Yssel, la Sala des anciens, à laquelle il a emprunté son nom. C’est ici que résidèrent les Francs saliens avant de descendre vers le sud pour conquérir la Gaule. C’est ici que fut rédigée la loi salique, à Saleheim et à Windoheim,