I.
La première fois que je vis Robert Wall, ce fut un soir du mois de décembre. Il était environ sept heures ; ma cousine et moi, blotties sous les rideaux de la fenêtre, nous regardions avec impatience tomber la neige, qui ensevelissait sans bruit la cour de l’hôtel.
J’avais vingt-deux ans, et Louise dix-sept. Elle était vêtue, — je la vois encore, — d’une robe de soie d’un rose pâle ; ses épaules délicates et sa jolie tête blonde sortaient de cette robe comme un lis blanc d’un bouquet de roses. Elle était bien charmante, et je le lui disais : alors elle courait en riant s’admirer dans la glace, puis elle revenait, et, appuyant son visage contre les vitres, « il ne viendra pas, » disait-elle avec un soupir.
Pour tromper son ennui, je lui parlais du bonheur qui l’attendait, de ses toilettes, de la vie de plaisir qu’elle pourrait mener après son mariage ; mais elle m’écoutait à peine. — S’il allait ne pas me plaire ! disait-elle ; songe donc, Madeleine, nous sommes presque mariés déjà, et nous ne nous connaissons pas. — Tout à coup elle tressaillit. — Le voici, s’écria-t-elle, c’est lui, c’est Robert !
La porte cochère venait de s’ouvrir lourdement ; une voiture entra dans la cour et s’arrêta au perron, juste au-dessous de nos fenêtres. Un homme descendit rapidement ; mais la marquise qui protégeait le perron nous empêcha de le voir. Une rougeur fugitive éclairait le visage ordinairement pâle de Louise. — Je n’ose pas descendre, murmura-t-elle d’une voix émue : dire que c’est ma