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renversé tout le vitrage, mais la cause de l’ouverture du tube n’était pas aussi facile à trouver. La première pensée fut que ce large trou avait été fait à dessein dans une intention criminelle, et sans doute, disait-on, à l’aide d’une forte râpe en acier comme les plombiers en emploient, car on apercevait distinctement des rayures serrées analogues à celles que produisent ces sortes d’outils. Toutefois, après un examen plus attentif, on reconnut que les rayures sur les deux bords du trou n’étaient ni parallèles entre elles ni dans les mêmes plans, qu’enfin elles n’avaient pu être pratiquées que par la dent d’un petit animal rongeur. C’était un rat qui seul avait produit tout le dommage.

On parviendrait facilement à prévenir de pareils accidens, si l’on substituait chez nous, comme cela souvent a lieu en Angleterre, dans la fabrication des tubes, au plomb, relativement mou, l’étain exempt d’alliage, métal bien moins lourd, mais beaucoup plus dur. On éviterait ainsi une autre cause de fuites accidentelles qui s’est révélée lorsqu’un ouvrier, croyant enfoncer un clou dans la maçonnerie ou dans une tringle en bois, avait percé un de ces tubes en plomb. C’est peut-être là une des raisons du moindre nombre d’explosions observées dans les maisons de Londres, mais ce n’est point la plus importante. La cause principale de ce fait remarquable doit être attribuée aux habitudes, très générales en Angleterre, d’une ventilation constante qui prévient, par un continuel renouvellement de l’air dans tous les locaux habités, l’accumulation du gaz et la formation des mélanges détonans. Toutes les dispositions usuelles des constructions urbaines dans les trois royaumes concourent à ce résultat : ce sont les fenêtres à coulisses, qui jamais ne peuvent être hermétiquement closes, les cheminées d’un grand tirage, opérant un énergique appel de l’air extérieur, les ustensiles tournans à petites ailes de moulins qu’on remarque dans les vitres d’un grand nombre de maisons de commerce, de larges persiennes en verre moulé au milieu des glaces extérieures de quelques hôtels publics, enfin les châssis tendus de fines toiles métalliques, tamisant l’air et servant toute la journée de fenêtres à la devanture des tavernes et d’un grand nombre de magasins. Ces dispositions très hygiéniques existaient dans les maisons anglaises avant l’introduction du gaz ; elles avaient été adoptées pour obvier autant que possible aux inconvéniens des émanations fuligineuses de la houille et du dégagement de l’acide sulfureux du coke pendant l’allumage et l’entretien des feux de cheminée. On nous permettra d’ajouter à ce propos que les nouvelles méthodes de ventilation récemment mises en pratique dans plusieurs de nos grands établissemens publics, et dont on trouve les plus parfaits modèles disposés avec succès par le général Morin