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vail si ardu. On sait que Puissant a relevé une erreur de cette nature dans les travaux de Delambre et Méchain, erreur telle que la valeur positive du mètre devrait être augmentée d’un sixième de millimètre. Enfin il a été reconnu que les méridiens terrestres paraissent avoir des longueurs inégales : celui qui passe par Paris serait plus grand que celui qui passe par New-York. — L’invariabilité de la base n’est donc pas un argument à invoquer en faveur du système métrique, qui possède au reste assez d’autres avantages pour qu’il soit indifférent de renoncer à celui-là.

Les travaux géodésiques dont il a été question jusqu’ici sont assez anciens pour qu’il ait suffi de les rappeler brièvement. On aurait même pu croire que la question était épuisée, et qu’après les opérations si minutieuses de Delambre et Méchain sur la grande méridienne de France entre Dunkerque et Barcelone, la vraie figure de la terre était suffisamment connue. Il est probable en effet que personne n’eût entrepris une nouvelle triangulation uniquement pour étudier la courbure d’un méridien terrestre; mais peu à peu tous les gouvernemens européens sentirent le besoin de dresser rigoureusement une carte correcte de leur territoire. La France commençait ce vaste travail dès le premier empire; après elle vint l’Angleterre, puis l’Allemagne et la Russie; l’Espagne ne s’est mise que récemment à l’œuvre. Ce n’est pas en Europe seulement que la topographie faisait des progrès. Aux Indes, au cap de Bonne-Espérance, aux États-Unis, dans l’Amérique centrale et en Égypte, partout enfin où la civilisation s’est étendue, partout où la colonisation fait naître les routes, les chemins de fer et les canaux, le lever du terrain est considéré comme le début nécessaire des travaux publics. Or les grandes triangulations qui servent de canevas à la topographie sont précisément ce que le géomètre met en œuvre pour étudier la forme du globe terrestre. Il ne faut donc pas s’étonner que les opérations géodésiques aient été continuées sans interruption et se poursuivent encore de nos jours.

Le désaccord que les astronomes du XVIIIe siècle observèrent entre les indications fournies par les arcs de la France, du Pérou, de la Laponie et du Cap pouvait tenir pour beaucoup à la faible étendue de ces arcs. Il est aisé de concevoir que les résultats sont d’autant moins justes que la longueur mesurée est plus courte, car les irrégularités locales jouent un plus grand rôle sur un petit arc que sur un grand. Les savans cherchèrent donc d’abord à étendre leurs observations sur un plus long parcours. Ainsi la méridienne française, qui s’arrêtait à Barcelone, fut prolongée par Biot et Arago vers le sud jusqu’aux îles de Fermentera et d’Iviça; au nord, elle fut reliée à la triangulation que les Anglais ont terminée depuis la Manche