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chacun présentait quelque particularité qu’il lui paraissait désirable de conserver.

Les divers partisans de la décentralisation s’attachaient d’ailleurs à deux ordres d’idées principaux, dont l’un, qui tendait à la formation des régions, a fini par être abandonné, tandis que l’autre, qui était relatif à l’organisation municipale, a gardé toute son importance. La théorie des régions fut en faveur dans les premiers jours qui suivirent la paix de Villafranca. La question se posait pour ainsi dire dans le domaine de la spéculation pure : il n’y avait pas, à proprement parler, de parti en Italie; mais plus tard, après l’annexion de Naples et de la Sicile, l’idée régioniste fut embrassée avec enthousiasme par une partie des populations méridionales de la péninsule. Elle perdit alors du terrain dans le nord, et finit par s’y effacer à peu près complètement.

Pendant la période où cette théorie eut quelque succès, les hommes modérés demandaient pour chacune des régions, qui devaient être alors le Piémont, la Ligurie, la Lombardie, la Toscane, l’Emilie et la Sardaigne, un gouverneur investi de pouvoirs assez étendus pour rapprocher l’administration des administrés, pour faire un certain nombre de nominations, pour décider sur place la plupart de ces questions qui vont d’ordinaire s’entasser dans les bureaux des ministères. A côté du gouverneur aurait été placé un conseil régional, et, pour que ce conseil ne fût pas tenté de prendre des allures politiques et de se donner des airs de parlement, il n’aurait pas été élu directement par la masse des électeurs, mais il aurait été formé de délégués nommés par les conseils des diverses provinces de la région. Quelques-uns demandaient plus : à l’état, l’armée, la diplomatie, la fixation et la répartition de l’impôt par régions; mais tous les travaux publics qui ne présentent pas un caractère tout à fait national, l’instruction des divers degrés, les établissemens de bienfaisance, les soins de l’hygiène publique, les institutions de crédit, la sous-répartition de l’impôt, étaient réservés à la région. Quelques autres, tout à fait radicaux, imaginaient un conseil régional nommé directement par les électeurs politiques et confiant le pouvoir à une junte exécutive. Celle-ci aurait nommé les employés du trésor, de l’enregistrement, des douanes, des contributions directes, les ingénieurs, les professeurs, les juges; elle aurait donné l’investiture laïque aux évêques; elle aurait dirigé le crédit foncier, les caisses d’épargne, les caisses de dépôts et consignations; elle aurait réglé les comptes généraux et dirigé l’administration souveraine de la justice. Telle fut la doctrine qui prédomina dans le conseil extraordinaire (consiglio di stato) qui fut institué en Sicile le 19 octobre 1860 par la prodictature pour « aviser aux