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Les séances de la section de physique et de chimie n’ont pas été moins intéressantes que celles des autres. M. Dufour de Lausanne a parlé d’un coup de foudre tombé à Clarens sur les bords du lac Léman, et qui a frappé cent cinquante pieds de vigne. Plusieurs membres ont rappelé des faits analogues. M. le professeur Clausius a exposé le second principe de la théorie mécanique de la chaleur, et M. Adolphe de Planta a traité de la composition chimique de plusieurs eaux minérales du canton des Grisons. Le soir même, la société visita l’une des plus curieuses de ces sources. L’administration des eaux ferrugineuses de Saint-Maurice l’avait invitée à se réunir avec la section de médecine pour examiner l’établissement dans tous ses détails. Une longue file de voitures se déroula comme un serpent sur la route qui longe le pied des montagnes entre Samaden et Celerina ; elle atteignit bientôt Saint-Maurice, puis l’établissement des bains, situé au milieu de la vallée, entre les lacs de Silz et de Saint-Maurice. Là s’élèvent de vastes constructions, déjà insuffisantes pour contenir le grand nombre de baigneurs qui affluent à ces eaux. De nouveaux bâtimens s’ajoutent aux anciens, et dans le village de Saint-Maurice les hôtels se multiplient chaque année. Ces eaux sont froides, limpides, inodores, à saveur piquante et astringente ; elles contiennent à la fois des carbonates, des sulfates alcalins et de plus du carbonate de fer : elles sont donc essentiellement toniques et conviennent singulièrement aux constitutions faibles ou débilitées. L’action de l’air vient s’ajouter à celle de l’eau, et nous n’étonnerons aucun médecin en disant que l’on a constaté l’heureux effet de cette double influence. L’eau ferrugineuse restitue au sang la proportion de fer sans laquelle il ne saurait vivifier les organes, et l’air aussi bien que l’eau, ranimant les forces digestives, concourent au rétablissement général d’une constitution délicate ou délabrée. Le repas qui nous réunissait dans la grande salle des eaux était un repas de baptême. Le grand chimiste et médecin Paracelse, né à Einsiedeln, dans le canton de Schwitz, en 1493, est le premier qui ait reconnu et préconisé les eaux de Saint-Maurice. Sur l’invitation de M. de Planta, la Société helvétique voulut bien être la marraine de l’une des trois sources. En lui donnant le nom de Paracelse, la société rendait hommage à l’un des hommes les plus remarquables et à l’un des plus grands caractères de l’ancienne Helvétie. Paracelse, le réformateur des sciences chimiques et médicales, le premier qui s’éleva contre la routine des écoles pour ramener les médecins à l’étude et à l’observation de la nature, était digne d’un pareil hommage. La source bienfaisante qu’il a révélée à l’humanité souffrante fera bénir à jamais son nom par ceux qui lui devront la santé. Un tel monument est plus durable que les statues