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Si l’expérience pouvait se faire au pôle, il n’y aurait aucune difficulté ; la question est purement géométrique : le plan d’oscillation est invariable ; l’observateur, qui tourne avec la terre sans en avoir conscience, doit attribuer à ce plan fixe un mouvement égal et contraire, et le voir par conséquent exécuter en vingt-quatre heures une révolution complète, en tournant dans le même sens que les étoiles ; mais à toute autre latitude la difficulté est plus grande ; le plan d’oscillation ne reste pas immobile. On peut en effet regarder comme évident qu’il doit être constamment vertical, et comme la verticale change de direction, qu’elle décrit en vingt-quatre heures un cône plus ou moins ouvert, suivant qu’on est plus ou moins près de l’équateur, le plan qui la contient à chaque instant est nécessairement un plan mobile dans l’espace. Les apparences sont donc produites ici par la combinaison du mouvement de la terre avec le mouvement inconnu que va prendre le plan du pendule, et qu’il faut déterminer. Or, pour y parvenir, M. Foucault invoque un principe dont la démonstration rigoureuse n’a pas été donnée jusqu’ici, mais qui lui semble évident, comme à Galilée le principe des vitesses virtuelles, et comme à Huyghens les postulata sur lesquelles il a fondé la théorie du pendule. Le plan d’oscillation, tout en restant vertical, doit, selon M. Foucault, se placer à chaque instant de manière à faire le plus petit angle possible avec la position qu’il occupait dans l’instant qui précède. Si l’on se donne en un mot la position du plan d’oscillation à un certain moment, pour savoir ce qu’il est devenu après un temps très court, un millionième de seconde par exemple, il faut déterminer la position nouvelle qu’a prise la verticale par suite de la rotation terrestre, et chercher, parmi tous les plans qui passent par cette direction, celui qui forme avec le plan primitif le plus petit angle possible. Cette ingénieuse hypothèse conduit très simplement à la loi tant de fois confirmée : la rotation du plan d’oscillation est proportionnelle au sinus de la latitude.

La belle expérience fut rapidement répétée dans l’Europe entière. Les professeurs de Florence l’exécutèrent dès qu’ils en eurent communication, et, par une association bien naturelle d’admiration, opérèrent à côté même de la tribune de Galilée. Ils voulurent ensuite chercher dans les procès-verbaux inédits de l’académie del Cimento si, parmi les nombreuses observations faites sur le pendule, il ne s’en trouverait pas qui eussent trait à l’expérience nouvelle. Ils trouvèrent en effet les lignes suivantes, écrites par Viviani: Osservammo che tutti i penduli da un sol filo deviano dal primo verticale e sempre per il medesimo verso.

L’assertion est très claire. Il n’est pas supposable que les académiciens del Cimento n’aient pas cherché la cause d’un effet aussi extraordinaire ; mais c’était une matière délicate, où il était dange-