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à faire, Foyatier avait auprès de la famille Flandrin l’autorité de l’expérience personnelle et le prestige d’un homme arrivé. Il usa de son crédit pour mettre Hippolyte et son frère sur la route qu’il lui avait fallu autrefois s’ouvrir courageusement à lui-même. A force de citer son propre exemple, de se porter garant de l’avenir, il réussit à avoir raison des obstacles qu’on lui opposait. Bref, les deux enfans, dont l’aîné était alors âgé de douze ans, purent entrer, grâce à lui, dans un atelier que dirigeaient en commun un peintre nommé Magnin et un autre artiste aujourd’hui plus connu, le sculpteur Legendre-Héral.

Tout alla au mieux pendant quelque temps. Hippolyte ne trouvait pas seulement auprès de ses nouveaux maîtres l’occasion de s’initier à l’étude de l’antique et du modèle vivant; il recevait d’eux aussi des conseils dans le sens de ses ambitions les plus chères, des indications conformes à ce qu’il croyait être alors sa véritable vocation, et lorsqu’il leur soumettait les esquisses qu’il avait, au sortir de l’atelier, tracées en face de quelque corps de garde, il n’avait pas, tant s’en faut, à redouter des reproches sur un pareil emploi de son temps. Malheureusement l’école perdit bientôt l’un de ses deux chefs. Le départ pour l’Italie, puis la mort de Magnin rompirent l’association à l’abri de laquelle le talent de Flandrin avait fait ses premiers pas. Flandrin toutefois était en mesure de se produire maintenant sur une scène un peu plus haute et de poursuivre, au milieu de nombreux condisciples, le progrès commencé sous les regards seulement de quelques camarades. Il se présenta donc et fut admis à l’école de Saint-Pierre, qui, comme on sait, est l’école des beaux-arts à Lyon. Il y passa près de sept années, non sans ajouter à ses études officielles le supplément de quelques travaux de son choix, d’études d’après des animaux, par exemple, qu’il allait faire à certains momens de la journée dans un faubourg de la ville, le tout en vue de sa spécialité future et de cette renommée comme peintre de batailles qu’il comptait bien mériter un jour.

En attendant, il fallait vivre, et, si mince que fût le secours, alléger de son mieux les charges qui pesaient sur la famille. Il fallait de plus se préparer des ressources pour tenter un voyage à Paris, car n’était-ce pas à Paris que les deux frères verraient de leurs yeux tant de chefs-d’œuvre dont quelques-uns à peine étaient parvenus jusqu’à eux, traduits tant bien que mal par la gravure ou par la lithographie? N’était-ce pas là qu’ils trouveraient les enseignemens par excellence pour le genre qu’ils se proposaient de traiter, et, — comme le leur avait dit avec plus de bonne volonté d’ailleurs que de sagesse un officier supérieur qui s’intéressait à eux, — qu’ils pourraient « apprendre successivement les secrets du dessin