Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 52.djvu/503

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en 1751 à Hradschina, près d’Agram. Mais, laissant de côté ces traditions incertaines, nous trouvons dans l’histoire de nombreux récits d’événemens semblables à celui d’Orgueil. Le plus ancien des aérolithes connus est tombé en Crète en 1478 avant Jésus-Christ. Les prêtres de Cybèle le conservaient dans leur temple comme une personnification de cette déesse, et dans l’antiquité chaque nouvelle chute était naturellement attribuée aux dieux. Les annales chinoises, fort bien tenues sur cette matière, abondent en récits de bolides dont la description s’appliquerait, sans y rien changer, au météore d’Orgueil. Un auteur, nommé Ma-touan-li, en a donné un catalogue circonstancié où l’on voit que les Chinois s’occupaient de cette question bien avant notre ère. Cladni a tenté la même entreprise pour l’Europe et a fait connaître les localités et les dates de plus de deux cents chutes authentiques. Aucun temps, aucun pays n’a été exempté de ces accidens, toujours observés avec curiosité, racontés avec empressement et souvent exploités par la crédulité.

Les sociétés savantes, on doit le dire à leur honneur, ont exigé des preuves positives avant d’admettre, comme étant réelles, les pluies de pierres météoriques. L’Académie des Sciences était si peu favorable à cette croyance qu’elle déclarait en 1769 qu’une pierre ramassée au moment de sa chute par plusieurs personnes qui l’avaient suivie des yeux jusqu’au moment où elle touchait le sol n’était pas tombée du ciel. La résistance de l’opinion publique dura jusqu’en 1802. À cette époque, une abondante pluie de pierres ayant été observée à Laigle, l’Académie saisit l’occasion qui lui était offerte de s’éclairer sur ce sujet et donna à Biot, alors le plus jeune de ses membres, la mission d’ouvrir une enquête sévère. C’était l’homme le mieux choisi pour une si délicate fonction et le plus capable de faire partager sa conviction. Il rapporta des pierres toutes identiques entre elles, dont quelques-unes avaient été recueillies par lui-même ; il fit de son voyage un récit plein d’élégance, et la cause fut jugée. Les plus habiles chimistes, parmi lesquels il faut citer Laugier, Thénard et G. Rose, firent l’analyse des aérolithes, où ils trouvèrent des caractères communs. On imagina des systèmes : les uns croyaient que les aérolithes étaient lancés par les volcans de la lune, qui sont éteints ; les autres firent intervenir l’électricité, qui est le deus ex machina de toutes les questions non résolues ; quelques autres ont affirmé que c’étaient des fragmens de planètes et de comètes écrasées par une collision mutuelle. Enfin on finit par où l’on aurait dû commencer, on observa, et le nombre des personnes qui se sont dévouées à ce pénible travail est aujourd’hui très considérable. Nous citerons parmi les plus distinguées M. Haidinger, un des membres de l’académie de Vienne, le père Secchi, directeur de l’observatoire du Collège-Romain, et le professeur Heis, de Munster, qui apporte dans ces questions autant de persévérance que de talent. En Angleterre, une commission de savans s’est attribué le devoir de recueillir et de provoquer les observations ; elle compte parmi ses membres MM. Glaisher, Brayley, Prestwich,