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nos troupes. Or aucune des réserves récemment posées, et qui ne s’appliquent qu’à une époque où nous ne serons plus à Rome, ne nous dispense de remplir l’engagement que nous avons pris de retirer nos troupes dans deux ans. Le grand acte de la convention du 15 septembre est là tout entier, et il est impossible de l’obscurcir par des contestations qui ne portent que sur des objets indéfinis, éventuels et vagues. S’il était vrai que le pouvoir temporel ne pût subsister que par l’appui de l’intervention étrangère, en prenant la résolution de quitter Rome le gouvernement français aurait bien pris son parti de la chute du pouvoir temporel. Si le pape ne veut pas s’entendre avec l’Italie sur la question de la dette, s’il ne veut pas organiser la force militaire prévue par la convention, s’il ne veut pas se donner les moyens de défense et de conservation nécessaires à tous les gouvernemens, nous n’en retirerons pas moins nos troupes de Rome, quelles que puissent être pour la papauté temporelle les conséquences de notre départ. Voilà, selon nous, les suites de la convention qui devraient exciter l’anxiété des esprits. Qu’on y prenne garde, le premier péril auquel le pouvoir temporel sera exposé, c’est nous qui allons le lui faire courir en lui retirant notre protection militaire. La controverse diplomatique à laquelle la convention pouvait donner lieu, après une réponse de M. Drouyn de Lhuys à la dernière note du général La Marmora, sera terminée ; la convention sera dans peu de jours sanctionnée par le vote du parlement italien ; dans quelques mois, la capitale de l’Italie sera transférée à Florence. Il n’y aura plus alors à discuter sur des choses aussi vaporeuses que des aspirations nationales s’appuyant sur les forces de la civilisation et du progrès. Il faudra que la France avise, pour ce qui la concerne, à l’application de la convention ; il faudra qu’elle se prépare à l’évacuation progressive de Rome ; il faudra qu’elle interroge d’une façon pressante la cour de Rome sur ses intentions et sur ses projets ; il faudra qu’elle sache si la cour de Rome accepte ou refuse la transaction financière qui lui est proposée ; il faudra qu’elle sache comment le pape entend pourvoir à l’organisation d’une force protectrice de l’ordre dans ses états. Voilà une série de questions positives et de difficultés pratiques qui vont s’ouvrir et qui devraient dès à présent provoquer le travail d’une prévoyance sérieuse. C’est quand nous songeons à la partie de la convention qui concerne la France et la papauté que nous sommes plus portés à déplorer l’inopportunité et l’inutilité de la controverse diplomatique à laquelle nous venons d’assister. Qu’a voulu faire la France en signant la convention du 15 septembre ? Elle a voulu évidemment donner à l’Italie un secours moral. Nous aurions désiré que ce secours, pour garder toute son efficacité, fût généreux jusqu’au bout, et ne se laissât point piquer et offusquer par des susceptibilités de paroles ; nous le désirions surtout en songeant aux difficultés auxquelles nous nous heurterons nous-mêmes quand nous arriverons à l’exécution de la partie de la convention qui nous concerne.