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injustice, Plus tard, un berger écossais recueillit, à diverses époques, de petites quantités d’or qu’il rapporta dans la capitale. Tous ces faits avaient peu de retentissement. Les colons, portés vers d’autres occupations, ne s’en détournaient pas pour se livrer à des recherches aléatoires.

Après avoir consacré plusieurs années à des voyages de découvertes à travers les grandes chaînes de montagnes du continent, le comte Strzelecki, qui, bien différent des autres explorateurs, ne s’occupait que de recherches scientifiques, avait rapporté à Melbourne une collection de minéraux de toute sorte recueillis pendant ses excursions. En 1839, il annonçait, dans un rapport adressé au gouverneur de la Nouvelle-Galles du Sud et dans quelques lettres à ses amis, qu’il avait trouvé un échantillon d’argent natif et un silicate renfermant des traces d’or, ce qui semblait démontrer l’existence de ces métaux précieux dans les montagnes qu’il venait de traverser. N’ayant pas eu le temps d’examiner en détail la région d’où ces minerais provenaient, il engageait le gouvernement à y envoyer un ingénieur ou un minéralogiste dont les investigations révéleraient peut-être des richesses inattendues. Loin d’accéder au désir qu’il exprimait, le gouverneur, sir George Gipps, effrayé des conséquences qu’une telle découverte produirait dans une colonie peuplée de 45,000 convicts, invita le comte Strzelecki à ne pas divulguer sa découverte. C’est ce que fit celui-ci, peu soucieux, comme beaucoup de savans, de faire sortir de ses travaux un résultat pratique et ne se doutant pas assurément de l’incroyable importance que la production de l’or devait donner au pays.

Deux ou trois ans plus tard, un autre géologue, le révérend B. Clarke, montrait à divers habitans de Sydney des fragmens de quartz aurifère qu’il avait trouvés, en traversant les montagnes entre Paramatta et Bathurst, et il se disait certain de recueillir, si l’on voulait, une grande quantité de minerai. Cette fois encore le gouverneur obtint de l’heureux explorateur que sa découverte serait tenue secrète, par crainte d’un bouleversement social et de la dispersion des nombreux condamnés qu’une force militaire très restreinte eût été impuissante, à contenir ; mais cette grande nouvelle semblait surgir de toutes parts. Peu après, en 1844, sir Roderick Murchison, l’un des hommes les plus autorisés dans les études géologiques en Angleterre. ; annonçait publiquement devant la Société de géographie de Londres qu’il venait d’examiner certains échantillons rapportés en Europe par le comte Strzelecki, sans savoir néanmoins que ce voyageur et M. Clarke avaient positivement trouvé de l’or en paillettes, que les montagnes de l’Australie présentaient une conformité remarquable avec les monts Ourals, où l’or existe en abondance,