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homme travaille seul, tour à tour piochant la terre et lavant les détritus qu’il en tire. Le plus souvent ils s’associent trois ensemble ; l’un creuse le sol, l’autre fait marcher le crible à la main, le troisième s’occupe de la cuisine, et garde la tente où est leur établissement commun. Chaque jour, ils alternent de fonctions à tour de rôle. On prétend que ces petites associations, fondées sur la bonne foi, se terminent souvent aux dépens du plus faible, qui est dépouillé, assassiné même par ses compagnons. Lorsque la veine descend à 3 ou 4 mètres de profondeur, on creuse un puits, et au fond de ce puits de petites galeries horizontales dans le sens où le minerai est abondant. Aux premières pluies, le trou est abandonné, les galeries s’effondrent, et il ne reste plus aucune trace du travail de taupe exécuté par le mineur.

Tout cela est l’enfance de l’art. Ces méthodes ne conviennent qu’au mineur indépendant, qui veut travailler soit seul, soit avec un ou deux compagnons, et qui a besoin de gagner sa nourriture de chaque jour. Lorsque les émigrans de la Cornouaille, habitués au travail des mines, arrivèrent en Australie, ils s’aperçurent qu’il y avait mieux à faire, et que, pour réaliser des gains considérables et durables, il fallait déterrer les alluvions profondes qui reposent sur le terrain silurien. Après quelques essais timides, ce genre d’entreprise s’est perfectionné et est arrivé aujourd’hui à un merveilleux état de prospérité. Là où l’on suppose qu’il existe une veine souterraine, ce que l’on vérifie par des sondages préalables, on creuse un puits de grand diamètre à travers les couches d’argile, de sable et de basalte qui recouvrent l’alluvion aurifère ; les parois en sont consolidées à mesure au moyen d’un cloisonnage en bois. C’est un travail long et pénible, surtout quand il s’agit de transpercer le basalte, qui est d’une dureté extrême ; cependant le mineur ne se plaint pas trop de rencontrer cette roche, parce que l’expérience lui a appris que plus elle est épaisse, plus il a de chances d’approcher du minerai qu’il cherche. D’habitude il y a sous chacune de ces couches volcaniques une nappe d’eau qui fait irruption dans le puits. On installe alors des pompes que fait fonctionner la machine à vapeur, déjà employée à retirer les matériaux de l’excavation. En somme, le creusement d’un tel puits peut exiger de deux à cinq ans de travail, suivant la profondeur et exige un matériel dispendieux. Enfin, quand on est descendu jusqu’aux schistes sur lesquels repose le minerai, on creuse des galeries en différentes directions jusqu’à ce que l’on soit arrivé au gîte aurifère. C’est donc une entreprise qui exige beaucoup de temps et des capitaux abondans ; mais les produits sont en général si considérables qu’une part dans la propriété d’un puits est une vraie fortune. Quelquefois cependant