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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 55.djvu/677

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pour ne point plier sous les exigences qui l’assiègent et pour être à même d’élargir son action, alors que celle du crédit privé se resserre. Elle maintient la circulation sur la base solide du numéraire, en même temps qu’elle prête un énergique appui au commerce. Tel est le service qu’elle a rendu dans la crise que nous venons de traverser.

On comprend à merveille que les intérêts froissés par la hausse considérable de l’escompte aient fait entendre de vives réclamations : ce dont on souffre provoque immédiatement la plainte. La réflexion et l’étude peuvent seules élever l’esprit au-dessus de l’horizon étroit de l’intérêt privé en ouvrant les vastes aspects de l’intérêt général. Alors les préventions se dissipent, une appréciation calme ramène à un jugement plus équitable. Le chiffre de 6 milliards 550 millions d’escompte pour 1864 répond suffisamment aux reproches d’abandon du commerce et d’indolence. — Mais c’est à un taux élevé, dit-on, c’est à 6 fr. 50 c. en moyenne que ce crédit a dû être acquis ! On ne saurait en disconvenir. En dehors des causes que nous avons essayé d’indiquer et du mouvement des métaux précieux, qui expliquent comment les capitaux, surmenés par la spéculation, ont accru leurs exigences et comment le numéraire a imposé des sacrifices pour retrouver l’équilibre, il est un motif dont il n’a été tenu aucun compte, et qui pourtant domine la situation : le nouveau régime de liberté commerciale que la France a brillamment inauguré en 1860, et dont elle poursuit les fécondes applications, a créé pour tous les marchés une solidarité plus intime que par le passé. Le pays profite de relations plus nombreuses et plus étendues, les échanges se multiplient dans une proportion inconnue jusqu’ici, les liens se resserrent entre les nations, les bénéfices augmentent ; arrachés à leur isolement, les peuples, qui s’empruntent de mutuels avantages, se trouvent soumis aussi à une dépendance mutuelle, et le mal dont l’un d’eux est atteint se répercute forcément chez ceux qui entretiennent avec lui les rapports les plus intimes.

Le commerce général de la France ne dépassait point, de 1827 à 1836, une moyenne de 1 milliard 366 millions ; cette moyenne a été de 2 milliards 112 millions pour la période décennale de 1837 à 1846, et de 3 milliards 126 millions pour celle de 1847 à 1856. Le chiffre s’était élevé en 1857 à 4 milliards 593 millions en valeurs officielles, et à 5 milliards 328 millions en valeurs réelles. En ne tenant compte que de celles-ci, nous les voyons arriver à 5 milliards 412 millions en 1859, à 5 milliards 804 millions en 1860, à 5 milliards 745 millions en 1861. Ce chiffre a été de 5 milliards 949 millions en 1862, de 6 milliards 762 millions en 1863 ; il dépasse