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tion prise aujourd’hui par le gouvernement français dans les questions italienne et romaine nous parait être à la fois modérée et forte. Cette position, nous le croyons, ne peut manquer d’être éclaircie et fortifiée encore par les discussions du corps législatif. La tâche la plus difficile dans ce débat sera celle des hommes politiques qui voudront, sans s’écarter du bon sens, critiquer la convention au nom des intérêts du saint-siège. L’opposition démocratique n’aura point à s’étendre beaucoup sur la question italienne. Elle trouve dans la convention du 15 septembre un fait qui a de quoi lui plaire : c’est l’évacuation de Rome par nos troupes d’ici à deux ans. Cette promesse d’évacuation rend nécessairement l’opposition démocratique accommodante sur les questions qui peuvent s’élever à propos de l’avenir de Rome. Il est peu important pour elle aujourd’hui de pousser le gouvernement à faire des déclarations qui engageraient l’avenir, qui n’auraient pas d’opportunité présente, que le gouvernement serait parfaitement fondé à refuser et qu’il refusera en effet, on n’en saurait douter. Quant aux adversaires de la convention qui veulent rester des hommes politiques pratiques, nous sommes fort curieux de voir comment ils s’y prendront pour mettre leurs critiques d’accord avec le bon sens. Ces hommes-là savent qu’on perd pied en politique lorsqu’on s’éloigne du possible. Nous espérons qu’ils ne nous ramèneront point dans le passé pour nous montrer les diverses conduites qui ont été possibles en divers momens et qui n’ont point été tenues. Ces récriminations et ces romans rétrospectifs ne feraient point faire un pas à la question. On ne peut pas revenir en arrière, il faut partir du présent. Partant du présent, nous défions qu’on nous prouve qu’il y avait quelque chose de mieux à faire que la convention du 15 septembre c’est-à-dire un essai de conciliation entre l’Italie et le pape, fondée sur le statu quo territorial actuel. Pourquoi repousserait-on cette expérience avec le caractère conciliant qu’on veut y attacher ? On ne pourrait alléguer qu’un doute, le doute que l’Italie veuille renoncer à faire de Rome sa, capitale. Qu’en coûte-t-il de tenter l’épreuve ? Au pis aller, si l’Italie faisait mine de vouloir sortir de la lettre du traité, la France reprendrait sa liberté d’action, et les choses reviendraient à l’état où elles sont aujourd’hui ; mais on compromet au contraire l’intérêt pontifical, que l’on semble vouloir défendre, en poussant la cour de Rome à laisser échouer par sa faute la conciliation proposée, Si la résistance de la cour de Rome était la cause de l’insuccès d’une semblable combinaison, le pouvoir temporel, se montrant lui-même incompatible avec toute solution modérée et pratique des difficultés italiennes, perdrait ses derniers appuis. Les véritables amis de la cour de Rome, au lieu d’irriter ses défiances, d’exciter ses rancunes, d’entretenir ses illusions par le bruit des discussions parlementaires, devraient lui conseiller vivement et discrètement d’accepter la condition où la convention du 15 septembre lui promet la sécurité. Qui serait déçu par une pareille conduite ? Nous peut-être, et tous ceux qui ont un goût médiocre pour la puissance temporelle des papes.