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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 56.djvu/695

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qui commençaient dès lors à peser sur la Gaule et à lancer leurs chevaux dans les flots du Rhin. La nécessité de repousser ces perpétuelles attaques occupait toute l’attention des Trévires ; le vainqueur des Helvètes et des bandes suèves d’Arioviste leur apparut d’abord comme un allié, comme un libérateur ; en 57 avant notre ère, ils laissèrent écraser par les légions, sans intervenir dans la lutte, les autres Belges leurs frères, Bellovaques, Suessons, Nerviens, Ambiens, Atrébates, Ménapiens, Eburons. Au bout de quelque temps, ils s’aperçurent que le protecteur devenait un maître, et, malgré toutes les précautions prises par César, ils s’associèrent au soulèvement qui éclata pendant l’hiver de l’an 54. Un de leurs chefs, Indutiomar, qui avait des premiers signalé le danger et conseillé la résistance, tomba glorieusement, les armes à la main, après avoir manqué détruire le corps d’armée de Labiénus. Son nom mérite d’être inscrit sur la liste des martyrs de l’indépendance gauloise, à côté de ceux d’Ambiorix, de Camulogène, de Corrée, de Lucter et de Vercingétorix.

Distraits par de nouvelles attaques des Germains, les Trévires ne s’étaient que faiblement associés à l’héroïque et suprême effort que fit échouer la chute d’Alise. Labiénus n’eut pas de peine, pendant la dernière année de la guerre, à obtenir leur soumission définitive. Quand Auguste s’occupa d’organiser la Gaule transalpine, que César avait quittée aussitôt après l’avoir conquise, et de régler l’état des différens peuples qui l’habitaient, les Trévires furent rangés parmi les peuples libres (civitates liberœ), c’est-à-dire qu’ils obtinrent de garder leurs usages et leurs lois et de se gouverner eux-mêmes, sous la condition de payer un tribut et de fournir un corps d’auxiliaires. Leur capitale, dont il est fait alors mention pour la première fois dans l’histoire, prit le nom d’Augusta Trevirorum.

Les Trévires avaient heureusement choisi l’emplacement, de leur cité principale, de leur ville du milieu, comme on disait chez les Gaulois. Elle s’était élevée à peu près au centre de leur territoire, à égale distance environ du Rhin, frontière de la Germanie, et de Divodurum, aujourd’hui Metz, capitale des Médiomatrikes. Elle était assise sur la rive droite de la Moselle, un peu au-dessous de l’endroit où la Sarre, en y versant ses eaux, la rend plus aisément navigable en toute saison. Autour du point où durent se grouper les premières habitations, tandis que les collines de la rive gauche serrent de près le cours du fleuve, celles de la rive droite s’écartent de la berge et décrivent un vaste cercle ; la ville naissante devait donc être libre de se répandre dans la plaine aussi loin qu’elle le voudrait et de s’entourer de spacieux faubourgs. De fertiles terres d’alluvion, propres à la culture de toutes les céréales, forment