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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 56.djvu/801

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Pouvait-il avoir une existence officielle aux yeux de l’agent militaire d’une puissance européenne ? Il n’était pas encore, comme le parlement de Francfort, une diète diplomatiquement accréditée, formant la tête d’une grande confédération et constituant elle-même un gouvernement. En présence du corps diplomatique ordinaire, résidant au Pérou, chacun des membres du congrès ne représentait même pas aux yeux de l’amiral espagnol le gouvernement qui l’avait envoyé à Lima. On comprend du reste que, fidèle à une pratique ordinaire de la guerre, M. Pareja, comme M. Pinzon, ait tenu à séparer les adversaires qui se présentaient à la fois, et ait insisté pour n’avoir affaire qu’à l’un d’eux, le seul qui l’intéressât réellement.

Repoussée dans ses tentatives de négociation, l’assemblée sud-américaine n’en serait pas moins intervenue d’une manière utile dans le conflit hispano-péruvien, s’il faut en croire un article inséré dans l’un des journaux les plus importans de Lima sous le titre de Révélations. D’après cet article, le gouvernement du général Pezet aurait invoqué l’appui du congrès pour le soutenir dans sa lutte contre les exagérations de la chambre péruvienne. Les membres de l’assemblée sud-américaine, se jugeant supérieurs, comme représentans de la patrie commune, aux députés du pays, auraient suspendu l’effet de la loi du 13 septembre, et ce serait en vertu, de leur autorisation formelle que le cabinet de Lima aurait pu se dispenser de déclarer la guerre à l’Espagne. Cette version du Comercio n’a rien d’invraisemblable ; elle a été admise sans difficulté au Pérou, et nous avons tout lieu de la croire conforme à ce qui s’est réellement passé. Bien que représentant les opinions les plus avancées, les députés du congrès ont tous pris une part plus ou moins directe à l’administration des affaires publiques dans leur pays ; ils ont donc tous pu acquérir un peu de ce sens pratique, de cette mesure politique que ne manque jamais de donner l’exercice du pouvoir. C’aurait été là, du reste, la dernière intervention de l’assemblée sud-américaine dans les événemens du jour ; elle n’aurait pris aucune part aux négociations, qui ont été conduites par l’une des individualités les plus remarquables du Pérou, le général Vivanco. De manières élégantes, d’un esprit habile et insinuant, d’une énergie sans brutalité, cet ancien président du Pérou est parvenu à calmer sur plusieurs points les susceptibilités de l’amiral espagnol, et il a fait certainement pour son pays. tout ce que lui permettaient les difficiles conjonctures où il était placé.

C’est au moment où l’amiral Pareja venait embosser son escadre devant Callao, où la chambre péruvienne se déclarait en permanence, où le général Pezet, enfermé dans l’arsenal, acceptait enfin l’ultimatum qui lui était signifié, c’est alors que l’on apprenait au Pérou la chute du gouvernement bolivien, succombant sous une émeute de quelques hommes provoquée par un bas officier. Pendant cette succession d’événemens qui constataient d’une façon si triste et si vraie l’impuissance de ces états à se gouverner eux-mêmes et à se défendre au dehors, le congrès annonçait officiellement, un peu trop bruyamment peut-être, qu’il avait signé « premièrement un