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mée, divisé en trois colonnes sous le commandement des généraux Thomas, Scofield et Howard, se retirait doucement vers l’ouest, faisant une conversion à gauche en approchant des lignes de chemin de fer en-deçà d’Atlanta. Cette grande manœuvre commença le 29 juillet.

Le général Hood, qui prévoyait évidemment quelque tentative sur ses lignes de communication et qui avait avec deux corps occupé Jonesboro (à vingt milles d’Atlanta, sur la ligne d’Atlanta et de Maçon), attaqua brusquement la colonne unioniste de droite ; mais le général Howard repoussa l’attaque, et à l’approche des deux autres colonnes, les rebelles se retirèrent vers le sud (1er septembre). En même temps on entendit dans la direction d’Atlanta le bruit d’explosions qui annonçaient l’évacuation de cette ville. Le général Slocum, qui du Chattahochee suivait la marche des événemens, fit avancer sa colonne et prit possession de la ville abandonnée. (2 septembre). Une bonne occasion de détruire l’armée divisée de Hood était ainsi perdue ; mais le véritable but de la campagne était atteint, et cela avec un très faible sacrifice. Il n’est certainement pas facile de comprendre, pourquoi le général Hood replia ses forces sur Jonesboro, s’il n’avait point l’intention d’y livrer une bataille, et pourquoi il n’essaya point de défendre jusqu’à la dernière extrémité, avec le restant de son armée, les lignes fortifiées qui entouraient Atlanta.

Le succès de cette campagne de quatre mois du général Sherman à travers une ligne d’opération de cent cinquante milles est dû, comme l’on peut aisément s’en convaincre, à ses habiles manœuvres. Cet emploi de la stratégie était chose presque inconnue dans les opérations des armées américaines. L’effet moral de ces succès fut considérable sur les populations du sud, qui avaient été incessamment amusées par la prédiction de l’imminente ruine de Sherman. Le général victorieux ordonna aux habitans d’Atlanta d’abandonner la ville, dont il s’appliqua aussitôt à faire une véritable place d’armes et un vaste entrepôt. Les locomotives, traînant à leur suite des centaines de wagons, furent promptes à transporter dans ce nouveau centre d’opérations d’immenses quantités d’approvisionnemens. Il est bon de remarquer en passant que les armées américaines ont acquis une habileté surprenante en ce qui concerne la destruction et la réparation des chemins de fer, talent qui n’est surpassé que par celui qu’elles montrent aussi dans le percement des tranchées. L’armée du Potomac a mérité même à ce titre d’être comparée à une « seconde nature. » Il n’est pas rare de voir des soldats se creuser instinctivement des trous en terre pour s’y abriter, et cela au plus fort du combat, sans ordre aucun.

Pendant que le général unioniste était activement occupé à rassembler ses provisions et ses munitions dans Atlanta, Hood se préparait à opérer sur ses derrières, et là commence le second acte du grand drame militaire de la Géorgie. Ce qui est curieux dans cette nouvelle série d’opérations, c’est que les deux armées dirigèrent leurs premiers mouvemens vers des