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abattus. Les autels étaient déjà relevés. Une statistique administrative de l’époque constate que le culte était rétabli dans quarante mille communes. La conséquence véritablement importante du concordat, c’était la reconstitution, entreprise de compte à demi avec celui qui réédifiait alors toutes choses, de la puissante hiérarchie de l’église catholique. Cette église, reconstituée et soldée par lui, allait avoir à se préoccuper désormais beaucoup moins des sentimens de l’opinion publique et beaucoup plus de la volonté de l’état. A première vue, la différence ne lui semblait pas bien grande à elle-même, et de fait elle ne l’était guère, car ces deux grandes puissances marchaient alors ensemble. Les premiers fruits de l’alliance qui lui était offerte étaient d’ailleurs fort loin de lui déplaire. A peine la conclusion du concordat fut-elle devenue probable, que, sur une demande de l’abbé Bernier, le premier consul avait prié les évêques constitutionnels de ne pas prolonger le concile qu’il les avait autorisés à tenir. Ils s’étaient séparés sans plainte et de bonne grâce. Le concordat signé, et sans avoir besoin, nous le croyons, d’y être excité par personne, il fit savoir le 6 août au ministre de la police, Fouché, « qu’il eût à faire connaître aux journalistes, tant politiques que littéraires, qu’ils devaient s’abstenir de parler de tout ce qui pouvait concerner la religion, ses ministres et ses cultes divers[1]. » Cette recommandation adressée aux journalistes était aux yeux du premier consul comme le post-scriptum indispensable du concordat. Après avoir rétabli l’ordre, il prescrivait maintenant le silence. L’ordre et le silence durèrent, comme il l’avait voulu ; la suite de ce travail fera malheureusement voir qu’ils ne suffirent point à maintenir l’accord entre les contractans.


O. D’HAUSSONVILLE.

  1. Correspondance de l’empereur Napoléon, t. VII, p. 215.