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sollicitude. Ainsi il pose tout d’abord cette règle générale, que la liberté préparatoire pourra toujours être révoquée ; puis, descendant à quelques détails, il indique qu’elle le sera particulièrement, si le libéré commet de nouvelles fautes, s’il quitte sans avertissement la résidence qui lui a été assignée, s’il ne justifie pas d’un travail assidu et pouvant suffire à son existence, ou bien encore si des habitudes de dissipation ou le commerce de personnes suspectes élèvent contre sa conduite ou la sincérité de ses dispositions morales des suspicions légitimes : le condamné perd alors ses droits à la liberté provisoire, il est réintégré dans la maison de détention pour y subir le reste de sa peine.

Je reconnais volontiers que la liberté préparatoire, concédée sous de pareilles garanties, pourra, dans certains cas et jusqu’à un certain point, maintenir le libéré dans la voie d’une conduite prudente et réservée, du moins jusqu’à l’entier accomplissement de sa peine ; mais il faut bien que l’on m’accorde aussi qu’avec la liberté ainsi entendue et pratiquée, la question de l’amendement moral des condamnés reste intacte, en ce sens qu’après tout cette liberté ne fait jusque-là que se combiner avec les apparences d’une conduite extérieurement irréprochable : rien de plus, rien de moins. Or il est évident que cette manière d’être du condamné, fût-elle, en ce qui concerne la discipline, exempte de toute sorte de fautes, ne suffirait pas cependant pour prouver l’amendement ; il faut de plus, et tel est aussi le sentiment de M. Bonneville, que non-seulement le condamné montre un grand zèle pour toutes les choses bonnes et utiles, particulièrement pour l’instruction morale et religieuse, mais encore que sa conduite soit telle qu’elle indique à la fois un sincère repentir pour les fautes passées et de non moins sincères aspirations vers un honnête avenir.

Sur ce terrain, on serait, il me semble, bien près de s’entendre. Je remarque cependant qu’il n’a été rien dit encore du mode de constatation de cet heureux amendement, si longtemps inespéré, nos plus que des effets qui doivent le suivre : je me trompe, M. Bonneville tranche la question en affirmant sans hésiter que l’amendement moral des condamnés ressortira avec un degré suffisant de certitude des témoignages réunis du directeur, de l’aumônier, de la commission de surveillance, sans préjudice du contrôle du préfet, et au besoin de celui du ministre. C’est net et péremptoire, je n’en suis pas surpris, car c’est bien à peu près tout ce qui pouvait être dit sur ce point, l’un des plus délicats sans contredit de la difficulté.

Poursuivant l’apologie du système, M. Bonneville ajoute qu’il serait encore fortifié par l’attribution au condamné, à sa sortie, d’un pécule assez considérable pour la satisfaction de ses besoins pendant un certain temps : la transition entre la prison et le reclasse-