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à la psychologie, le Traitement moral de la folie, par M. Leuret, ouvrage très contesté par les praticiens, mais qui indique un esprit vigoureux, décidé, plein d’originalité et de nerf ; les Hallucinations, par M. Brière de Boismont, mine inépuisable de faits curieux, œuvre d’une psychologie ingénieuse, mais qui laisse quelquefois désirer une critique historique plus sévère ; la Folie lucide du docteur Trélat, l’un des livres qui, sans aucune théorie, donne le plus à réfléchir par la triste singularité des faits qui y sont révélés ; la Psychologie morbide de M. Moreau de Tours, essai paradoxal et piquant, qui excite la pensée en l’irritant, et qui n’est d’ailleurs que l’exagération de la thèse spirituelle soutenue par le docteur Lélut dans ses deux ouvrages du Démon de Socrate et de l’Amulette de Pascal, Enfin je citerai encore la Phrénologie spiritualiste du docteur Castle, tentative curieuse où la phrénologie essaie de se régénérer par la psychologie.

Tandis que certains physiologistes portaient leurs études jusque sur les confins de la philosophie, il est juste de dire que les philosophes de leur côté essayaient une marche en sens inverse. Déjà notre maître si regretté, M. Adolphe Garnier, dans son livre si ingénieux et si exact sur la Psychologie et la Phrénologie comparées, avait ouvert cette voie. De jeunes philosophes se sont mis sur ses traces : un surtout s’est signalé dans cette direction, M. Albert Lemoine. Son livre sur le Sommeil, un autre sur l’Aliéné, un troisième sur l’Ame et le Corps, témoignent d’un esprit très sagace, très philosophique, qui, sans faux positivisme, est cependant très attentif à la recherche des faits, et qui en même temps, sans déclamation spiritualiste, est très ferme sur les principes. Enfin, puisque nous parlons ici de l’alliance de la physiologie et de la psychologie, signalons une société scientifique établie depuis une vingtaine d’années, et qui a précisément pour but d’accomplir et de consolider cette alliance : je veux parler de la Société médico-psychologique. Cette société publie des annales trimestrielles, où se trouvent de nombreux mémoires dignes du plus haut intérêt.

Nous n’avons voulu mentionner ici que les ouvrages et les écrivains qui se sont placés au double point de vue de la physiologie et de la psychologie, et qui n’ont point séparé l’étude des organes de celle de la pensée. S’il ne s’agissait en effet que de physiologie pure, nous aurions dû avant tout autre rappeler le nom de M. Claude Bernard et son livre sur le Système nerveux. Ce grand physiologiste, qui représente aujourd’hui avec tant d’éclat la science française, ce noble esprit, qui unit avec tant d’aisance le bon sens et la profondeur, est désormais le maître et le guide de tous ceux qui veulent pénétrer dans les replis de ce labyrinthe obscur que l’on ap-