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mortalité est possible. Tous ces points, dit-on, sont hors de la science. Alors ils se tournent en objections contre la science. Tous ces points, dit-on encore, sont des questions insolubles. Il se peut : je veux dire que peut-être on n’en saurait donner de solution évidente et péremptoire ; mais il resterait à les résoudre par des hypothèses. Une hypothèse non prouvée, mais qui concorde avec les faits, est un procédé légitime et usité dans les sciences. En ne.se pourvoyant pas, sur l’origine de l’âme, sur son union avec le corps, sur sa destinée après cette vie, d’hypothèses compatibles avec tout ce qu’on sait et tout ce qu’on affirme de son existence et de sa nature, on compromet tout ce qu’on affirme et tout ce qu’on sait de l’une et de l’autre. Pour ne vouloir parler des choses qu’avec certitude, on rend incertain tout ce qu’on en dit, et la science qui se récuse sur tant de questions finit par être récusée sur toutes.


V

C’est cette considération entre autres qui a donné naissance aux recherches et aux spéculations dont il nous reste à entretenir le lecteur. Nous les présenterons, non comme des complémens acquis à la science de l’homme, il s’en faut bien, mais comme les produits intéressans d’une curiosité légitime, comme les tentatives ingénieuses d’une juste ambition de faire converger toutes nos connaissances vers la vérité philosophique. Nous voulons parler des essais hasardés dans ces derniers temps pour déterminer presque scientifiquement les conditions d’existence et de séjour de l’âme après la mort. Ce n’est pas la moins obscure ni la moins difficile des questions que nous avons signalées à la psychologie comme moins étrangères à son objet qu’elle ne l’a paru croire jusqu’à présent : non cependant que la psychologie puisse à elle seule les résoudre, car l’expérience interne ne nous dit rien du monde où nous pouvons nous survivre. Il faut, pour oser y pénétrer, que le champ de la pensée s’agrandisse ; autrement on reste éternellement en présence de quelques idées partielles et détachées qui ne se laissent point coordonner ensemble. D’abord une psychologie timide et restreinte se borne à supposer qu’il y a une âme et qu’elle survit ; puis vient la théodicée, qui tient seulement à nous annoncer un avenir de peine et de récompense ; enfin la théologie, comme confirmation, nous présente le monde comme divisé en deux parties seulement, le paradis et l’enfer. Que faire, avec ces trois notions isolées, obtenues par des voies différentes, de ce que nous enseigne l’astronomie de l’immensité du monde, tandis que l’astronomie elle-même, séparée des autres sciences, ne nous le montre que