ler toutefois sa sympathie pour la cause des pavillons européens qui combattaient sous ses yeux. Il n’eut donc pas à refuser de prendre la route de Peh-tang, qui lui était indiquée par les commissaires chinois. Disons tout de suite que le 20 juillet, en vertu d’un décret impérial, il fut autorisé à débarquer à Peh-tang ; il arriva à Pékin le 28, après un voyage des plus pénibles, effectué partie en chariot, partie en barque ; il y resta quinze jours sans pouvoir remettre en personne la lettre adressée par le président des États-Unis à l’empereur de Chine, parce qu’on voulait exiger, de lui l’humiliante cérémonie du ko-tou. Il dut laisser cette lettre aux commissaires chinois chargés de la recevoir, et finalement il revint à Peh-tang, où s’accomplit sans la moindre solennité l’échange des ratifications par les mains du gouverneur général de la province du Chih-li.
Après l’échec de Takou, l’escadre anglaise quitta le golfe de Pe-tchi-li et ramena MM. de Bourboulon et Bruce à Shang-haï. En rendant compte à leurs gouvernemens des faits qui venaient de se passer, les deux ministres n’eurent pas de peine à justifier la conduite qu’ils avaient tenue, et qui était d’ailleurs conforme à leurs instructions. Il ne leur restait qu’à attendre de nouveaux ordres, inspirés par la situation nouvelle qu’avait créée la reprise des hostilités. Un assez long délai devant s’écouler jusqu’au retour du courrier d’Europe, ils pouvaient étudier à loisir les dispositions des Chinois et recueillir des renseignemens exacts sur l’effet produit à Pékin par les derniers événemens.
Ainsi qu’on l’avait déjà remarqué dans tout le cours des relations européennes avec la Chine, il existait au sein du gouvernement chinois deux opinions, deux partis contraires, l’un prêchant la guerre sainte contre les barbares et poussant aux mesures extrêmes, l’autre conseillant la paix et la modération envers les étrangère. Le parti de la guerre, à la tête duquel se trouvait alors le prince San-ko-lin-sin, le vainqueur de Takou, se composait principalement des généraux et des dignitaires qui, n’ayant jamais quitté Pékin, demeuraient convaincus de la supériorité chinoise et s’obstinaient à penser que leur céleste empereur ne pouvait considérer les Européens que comme des rebelles dignes de tous les châtimens. Au parti de la paix appartenaient les mandarins qui, soit en qualité de commissaires impériaux, soit à titre de gouverneurs-généraux des provinces, avaient vu de près les étrangers, et pouvaient apprécier leurs ressources ainsi que leurs moyens d’action. Mieux éclairés, ces mandarins ne se dissimulaient pas que la force était bien réellement du côté des Européens ; ils ne se laissaient pas aveugler par les lauriers que le glorieux San-ko-lin--