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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/730

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se composa de grands chapeaux de paille du pays à larges bords, de pelisses en drap rouge, à tresses noires et à boutons de cuivre, de ceintures rouges, de pantalons de toile, de grandes bottes à l’écuyère pour les cavaliers, de souliers et de guêtres pour l’infanterie. A partir de ce moment, les Mexicains désignèrent nos guérilleros sous le nom de colorados (les rouges). La contre-guérilla n’avait pas été la première à recevoir un surnom. Après le combat d’Atlisco, livré en mai 1863, à douze lieues de Puebla, par le 3e chasseurs d’Afrique, les cavaliers de Porphirio Diaz, devenu plus tard le héros d’Oajaca, avaient laissé aux chasseurs, dont les sabres les avaient cruellement maltraités, le titre glorieux de carniceros azules (les bouchers bleus).

Puebla venait cependant de succomber. L’armée faite prisonnière avait été en grande partie incorporée dans les rangs de la division du général Marquez, notre allié depuis l’ouverture des hostilités. Quant aux officiers mexicains, leur internement en France et à la Martinique avait été décidé ; ils se mirent en route pour l’Europe vers la fin de mai. Pendant leur séjour à Orizaba, au mépris de leur capitulation, une grande partie d’entre eux, leur général en chef Ortega en tête, parvint à s’échapper. Au point de vue de l’honneur militaire comme au point de vue du devoir, le général Ortega commit une grosse faute. La France était assez généreuse pour lui faire un accueil exceptionnel. Sa défense l’avait honoré, sa fuite produisit une triste impression : l’insuccès de sa campagne de recrutement entreprise plus tard aux États-Unis a dû le lui prouver. Pour les officiers, l’idée d’un exil à la Martinique les avait glacés de terreur. Mille fables absurdes se débitaient parmi eux sur les tortures qui les attendaient dans notre colonie des Antilles. Beaucoup de ces officiers improvisés, galonnés sur toutes les coutures, manquaient d’éducation et trahissaient leur ignorance par une crédulité ridicule. Quoi qu’il en soit, le convoi de prisonniers mexicains repartit fort diminué d’Orizaba, et les chefs d’escorte eurent mission de redoubler de surveillance. La contre-guérilla reçut de son côté l’ordre de monter le 4 juin à Paso-Ancho, pour recevoir le convoi et l’accompagner à la Soledad.

Les Mexicains échappés d’Orizaba s’étaient enfuis dans toutes les directions des terres chaudes. Tlaliscoya sur la gauche et Huatusco sur la droite étaient leurs points de ralliement. Un peu plus à droite, les juaristes avaient réoccupé la ville de Jalapa, traversée en janvier 1863 par la division Bazaine. Le 1er juin, les Indiens, en venant au marché de la Soledad, signalèrent des mouvemens de bandes ennemies dans plusieurs directions. Le colonel Gomez était sorti de Tlaliscoya, qui avait fait un nouveau pronunciamiento contre