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Page:Revue des Deux Mondes - 1865 - tome 59.djvu/978

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disposés par la main des parens ou les soins des moines de la bonzerie voisine ; on y joint quelquefois une coupe en porcelaine remplie de riz. Ici malheureusement, comme ailleurs, le temps fait bientôt succéder à ces pieuses pratiques l’indifférence et l’oubli ; les vieilles tombes n’ont plus d’autre parure que l’herbe sauvage, les mousses et les lichens aux brillantes couleurs. Les Japonais ont pour habitude de brûler leurs morts, ce qui explique le peu d’emplacement occupé par ces tombes. De petites concessions entourées d’une barrière sont réservées pour l’usage des familles d’un certain rang ; les pierres tumulaires sont disposées, avec des vases de fleurs, des deux côtés d’une allée de quelques pas de longueur ; au fond de l’allée s’élève une pagode en miniature. Les pagodes japonaises ont toutes à peu près le même caractère. Construites en bois sculpté, recouvertes d’énormes toits de forme chinoise, ornées de ferremens et de figures en bronze, elles plaisent par l’originalité des détails et le sentiment d’élégance et d’harmonie qui a présidé à la conception de l’édifice. La pagode la plus renommée de Simonoseki est celle de Kami-hama-You, bâtie sur le sommet d’un petit monticule isolé, entouré moitié par la mer, moitié par la ville même ; on y monte par trois grands escaliers ombragés de beaux arbres, ornés de portiques et de lanternes en granit. En arrivant au sommet, nous reconnûmes facilement, de chaque côté du corps de logis principal, deux esplanades disposées pour loger des canons, mais vraisemblablement abandonnées depuis plusieurs mois. C’est de ce point, l’année précédente, que les Japonais avaient tiré sur le Kien-chan, le Wyoming et la Méduse à leur passage devant la ville.

Les divisions alliées restèrent au mouillage de Simonoseki dix jours environ après la suspension des hostilités. Dans leur mémorandum du 25 août, les représentans étrangers à Yokohama, indiquant aux commandans en chef une ligne générale de conduite, signalaient à leur attention deux points principaux. Ils demandaient d’abord qu’on s’emparât d’une position importante du détroit et qu’on la conservât comme gage jusqu’au jour où, par l’intermédiaire du taïkoun, le prince de Nagato aurait consenti à payer une indemnité en compensation des frais de la guerre. Ils demandaient ensuite qu’on examinât, au point de vue maritime, s’il y aurait avantage à réclamer l’ouverture, dans le détroit de Simonoseki, d’un nouveau port commercial. Sur le premier point, il parut difficile au commandant en chef de notre division navale de suivre la marche proposée. L’occupation plus ou moins prolongée d’une partie quelconque du détroit exigerait un déploiement de forces auquel les Anglais pourraient seuls suffire au moyen de leur bataillon de