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doive point les confondre dans leur inspiration et leurs effets, ont également échoué. Ils n’ont réussi ni l’un ni l’autre à persuader la Hongrie et à la faire sortir de l’espèce de sécession par laquelle elle tenait en échec les forces morales et matérielles de l’empire. Les Allemands ont mis deux fois la main à l’œuvre ; il est juste que les autres aient leur tour.

L’arrivée à Paris d’un brave général américain, d’un lieutenant de Sherman, le général Schofield, a fait sensation, comme on aime à dire, dans son pays. Le général venait-il en homme privé ou public ? Était-ce un simple touriste, ou nous arrivait-il chargé d’une mission ? Était-ce un porteur de paroles, ou un interrogateur officieux que le cabinet de Washington envoyait au cabinet des Tuileries pour causer un peu à fond des affaires du Mexique ? Cette curiosité était oiseuse ; sans y répondre, le général a trouvé l’occasion de l’éluder gracieusement. Les Américains résidant à Paris, voulant se conformer à l’ordre présidentiel, ont célébré la fête d’actions de grâces en l’honneur du triomphe final de la république. Le général Schofield était présent au banquet et a porté un toast à la perpétuité de l’alliance entre la France et les États-Unis. Nous ne savons si nous nous trompons, mais nous croyons, quant à nous, que la France ne doit appréhender aucun mauvais procédé de la part des États-Unis dans l’affaire du Mexique. Les Américains ne sont ni des ignorans ni des lourdauds. Ils savent que l’entreprise mexicaine n’est point née chez nous d’une inspiration de l’opinion publique, et qu’elle n’a point chance de devenir pour nous l’objet d’une manie nationale. Ils sont assez pratiques pour comprendre que la France est bien plus intéressée à s’en aller du Mexique qu’eux à nous en voir sortir. Le Mexique nous coûte gros chaque jour à nous : l’entretien d’un corps de trente mille hommes, des dépenses dont le remboursement serait bien hypothétique, si le public ne prenait les obligations mexicaines à loterie. Notre entreprise ne coûte rien au contraire aux États-Unis, si ce n’est une atteinte portée à un principe abstrait posé par un des fondateurs de leur politique étrangère, principe qu’il leur suffit de revendiquer verbalement pour mettre à l’aise leur honneur. C’est donc nous qui avons intérêt et devons avoir hâte de convenir avec les États-Unis de quelque chose qui puisse nous permettre de rappeler nos troupes du Mexique. Le jour où une conversation s’entamera sérieusement à ce sujet entre le cabinet français et le cabinet américain, on se trouvera probablement d’abord dans un cercle vicieux. La France dira aux États-Unis : Reconnaissez l’empereur Maximilien, et je ramène mes troupes ; les États-Unis répondront : Partez, retirez au nouvel empire la couleur d’une protection et d’une intervention étrangère, et nous reconnaîtrons Maximilien. Mais il faudra bien que le cercle se resserre et qu’on y trouve une issue. Nous le répétons, c’est à nous qui donnons du sang et de l’argent d’être plus pressés de trouver cette issue. Les États-Unis peuvent attendre ; ils attendent si bien qu’ils vont réduire leur armée à cinquante mille hommes, effectif qui ne sera guère supérieur aux troupes dont l’empereur Maximi-