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prévenir de plus grandes horreurs. Elle veut qu’on ne s’occupe que du salut de la France et non de sa sûreté personnelle. On voit que l’espoir n’est pas éteint dans son cœur, et que son courage égale son infortune… Elle demande ce qu’est devenu le comte de Fersen elle n’en a eu aucune. nouvelle. L’énergie de Marie-Antoinette allait rendre en effet quelque vie au parti du roi.

Ce peu de liberté qui revenait à la famille royale lui avait été rendu lors de l’affaire de la constitution. Louis XVI avait paru, en acceptant l’acte constitutionnel, malgré les émigrés et les princes, dans la journée du 14 septembre, vouloir tenter de bonne foi une expérience. Le parti constitutionnel qui s’était formé autour de lui avait répété aux souverains étrangers qu’en l’absence de toute menace extérieure le nouveau pacte, observé loyalement, ne pourrait manquer d’être amendé bientôt dans le sens de la monarchie. L’empereur d’Autriche, auprès de qui l’ambassadeur français, le marquis de Noailles, avait été l’interprète de ces vues, sembla les adopter, et le roi de Prusse s’écria, dit-on, en apprenant l’acceptation de Louis XVI « Enfin je vois la paix de l’Europe assurée! » Rien ne permet d’affirmer que les uns et les autres n’aient pas été sincères, au moins un moment. L’Autriche, l’Angleterre et la Prusse firent à la circulaire royale du 19 septembre, qui notifiait l’acceptation, une réponse très pacifique, et témoignèrent même de leurs intentions amicales. La Russie, l’Espagne et la Suède refusèrent au contraire de recevoir un acte que Louis XVI, à leur avis, n’eût pas signé, s’il eût été libre. Voici comment la chose s’était passée à Stockholm. Le chevalier de Gaussen, étant malade, avait envoyé en copie au secrétaire d’état des affaires étrangères, Franc, la lettre de notification du roi, celle qu’il avait écrite à l’assemblée, et le nouvel acte de constitution. Il avait reçu immédiatement cette réponse


« A M. le chevalier de Gaussen, à Stockholm. Le secrétaire d’état de Franc a reçu aujourd’hui (7 octobre), de la part de M. le chevalier de Gaussen, un paquet dont le cachet porte : Mission de France en Suède ; mais comme, vu la captivité du roi de France, on ne connaît pas plus en Suède qu’en Russie de mission de France, le secrétaire d’état, par ordre du roi, a l’honneur de renvoyer ce paquet sans l’ouvrir à M. le chevalier de Gaussen, et de le prévenir en même temps qu’une correspondance ultérieure à ce sujet serait parfaitement superflue. »


Gaussen avait renvoyé à Paris la lettre de notification refusée par Franc; il la reçut de nouveau avec ordre de la présenter une seconde fois, et força enfin le secrétaire d’état à en donner connaissance au roi de Suède. Des souverains qui avaient accepté ou de ceux qui avaient rejeté le message de Louis XVI, lesquels avaient