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GUSTAVE III
ET
LA COUR DE FRANCE

IX.
LES RÉGICIDES.


I.

L’acte sanglant qui a mis fin au règne et à la vie de Gustave III n’a pas été un fait isolé. Des rapports étroits et secrets, mais qu’il est curieux et instructif de découvrir, relient cet épisode au désordre moral de ce temps, et en ont fait le prélude immédiat des plus sinistres journées de 1793. Les fautes commises par Gustave III, on a pu s’en assurer par nos précédentes études[1], n’eussent pas suffi pour armer le bras des assassins. La vraie source où Anckarström et ses complices ont puisé leur inspiration première a été ce vertige causé pendant les dernières années du siècle par l’anéantissement de toute foi religieuse ou philosophique. De l’abîme ainsi creusé se sont élevées les nuées malsaines qui ont chassé toute lumière et enfanté le crime avec l’aveuglement.

Nul moment de l’histoire moderne n’a présenté une anarchie intellectuelle et morale comparable à celle qui accompagna en Europe la période révolutionnaire, si ce n’est peut-être quelqu’une des plus mauvaises années de la fin du premier siècle après Jésus

  1. Voyez la Revue du 15 février, 1er mars, 1er avril et 15 juillet 1864, du 15 août, 15 septembre, 1er octobre et 1er novembre 1865.