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de 1,200 mètres. Il ne faut point négliger d’ailleurs le travail qui est nécessaire pour gravir les hauteurs ce travail, pour 1 mètre d’élévation, équivaut à peu près à 100 mètres de parcours horizontal. On comprend que ce soit là un élément important à considérer dans les questions que soulève l’exploitation d’un chemin de fer. Notez d’ailleurs qu’il ne s’agit point, dans le cas qui nous occupe, d’un chemin à service restreint, mais bien d’une voie internationale où devront passer par grandes quantités les voyageurs et les tonnes de marchandises. Il faut donc employer tous les moyens possibles pour assurer la rapidité et la régularité du trajet, et il faut placer l’entreprise dans des conditions telles qu’elle puisse lutter avantageusement avec de sérieuses concurrences. Si nous portons nos regards sur les deux lignes qui sont actuellement en cours d’achèvement à l’est et à l’ouest de la Haute-Italie, nous trouvons d’abord que le Breuner est un col isolé, qui n’a point à souffrir du voisinage des hautes cimes; il est flanqué de montagnes boisées et de pâturages. Le chemin de fer y doit passer à ciel ouvert à une altitude de 1,366 mètres; mais, en raison de la situation spéciale du Brenner, il ne sera soumis que dans une faible mesure aux inconvéniens que présentent d’ordinaire ces régions élevées. Au Mont-Cenis, nous trouvons un tunnel qui commence du côté nord, à Modane, à 1,180 mètres de hauteur, et qui débouche au sud, à Bardonnèche, à 1,330 mètres. La longueur de ce tunnel dépasse, il est vrai, de plus du double celle des plus grands ouvrages de cette nature qui aient été exécutés jusqu’ici, et il est impossible d’en faciliter lâ construction en multipliant les points d’attaque; on ne peut songer à établir des puits à travers l’énorme massif de la montagne qui recouvre la ligne du tunnel. Cependant cet ouvrage considérable se poursuit avec succès, grâce aux machines Bartlett, construites pour percer la roche, grâce à l’emploi de l’air comprimé, dont M. Sommeiller se sert pour mettre en mouvement les outils perforateurs et pour renouveler l’atmosphère au fond de la galerie[1]. Les perfectionnemens continuels que reçoivent les procédés employés au Mont-Cenis; l’abondance des forces hydrauliques qui se rencontrent de toutes parts dans les Alpes, donnent aux ingénieurs la conviction qu’un tunnel de 12 et même de 15 kilomètres à travers ces montagnes peut être exécuté sans que la durée d’un tel travail présente aucune disproportion avec la grandeur du but qu’on veut atteindre. C’est donc aujourd’hui un principe généralement admis que la voie ferrée destinée à joindre l’Italie à la Suisse ne doit s’élever à ciel ouvert que jusqu’à 12 ou 1,300 mètres, et qu’elle doit franchir au moyen d’un tunnel le massif de la

  1. Voyez sur ces remarquables travaux la Revue du 15 février 1865.