Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/253

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

frap- d’exclusion, et l’on craindrait d’irriter l’autorité par une contradiction qui ne serait point opportune. Nous ne pouvons que gémir sur un état de choses qui rend possibles de tels conflits. N’est-il pas étrange que le principe d’autorité, comme on dit chez nous, soit amené à se commettre avec cette gravité et cette sévérité contre des escapades d’écoliers ? De pareils chocs nous confondent toujours. Nous en trouvons la cause dans l’excès de notre esprit autoritaire et dans l’organisation, suivant nous défectueuse, de notre université. À quoi bon faire ainsi de l’autorité à tout propos, en toute occasion ? Y a-t-il pour des erreurs d’opinion de répression plus juste et plus efficace que les jugemens mêmes de l’opinion publique ? Les débauches d’esprit sont-elles un accident si nouveau chez la jeunesse, et ceux à qui l’âge a malheureusement appris leur courte durée ne feraient-ils pas mieux de feindre de ne les point voir, au lieu de les mettre eux-mêmes en évidence par un étalage de sévérité ? Dans une société où l’on a vu de la jeunesse à l’âge mûr de si violentes mutations d’idées chez des hommes devenus les plus graves, est-on fondé à prendre si furieusement l’alarme ? Les hommes de notre génération ont vu des professeurs qui leur enseignaient le républicanisme devenir des conservateurs sévères et des organes rigides du principe d’autorité. Nous plaignons ceux que ces vicissitudes d’opinion n’ont point rendus indulgens envers la jeunesse ; puis, dans l’organisation de notre université, qui n’est point formée en corporation autonome et qui est peuplée de professeurs assimilés à des fonctionnaires, est-il bien facile de tracer ou de découvrir les limites de la discipline académique ? Une discipline quelconque, dans les idées naturelles, est quelque chose d’inférieur assurément à la justice nationale. Il est peu aisé de faire comprendre à des étudians, même à des esprits plus mûrs, que la discipline, prenant les formes judiciaires et appliquant une pénalité si grave qu’elle peut aller jusqu’à l’interdiction d’une carrière, ait une juridiction plus vaste que la loi même du pays, et puisse atteindre hors du territoire des délits que la justice ordinaire ne connaît pas. Il y a dans tout cela, ce nous semble, une grande confusion des choses et une excessive précipitation de conduite parmi ceux qui allèguent les intérêts de l’ordre moral et de l’ordre public. La vraie sagesse politique consiste à prévenir ces orages. Un bon moyen serait de réformer notre organisation universitaire et de définir législativement d’une façon claire et intelligible pour tous la discipline académique. Si nos jeunes étudians se trompent dans le jugement qu’ils portent sur les attributions de l’autorité disciplinaire, ils se trompent assurément de bonne foi. L’autorité n’a certes rien à perdre à ménager la bonne foi d’une jeune génération et à lui montrer sa sollicitude par la révision d’une législation mal définie, et qui donne lieu à de si regrettables malentendus.

Nous avons plus de goût à nous occuper des perspectives financières à propos du récent rapport de M. Fould à l’empereur. M. Fould nous semble