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que le pape et les autres princes chrétiens seraient appelés à seconder, et que conduirait l’empereur en qualité de capitaine-général.

Charles-Quint faisait dépendre la paix avec la France de l’acceptation prompte et complète des conditions qu’il imposait au roi prisonnier et à la régente sa mère. « S’ils les rejettent, écrivait-il a son frère l’archiduc Ferdinand, ce que nous saurons dans l’espace de six semaines, je pense alors à poursuivre ma bonne fortune et à m’adresser aussi à tous mes amis et alliés pour qu’ils se mêlent de l’affaire[1] » Il avait le projet, comme il le mandait à ses généraux en Lombardie, de descendre lui-même en France par le Roussillon et le Languedoc et d’opérer sa jonction à Avignon sur le Rhône avec l’armée d’Italie, qui passerait de nouveau les Alpes. Il prévenait en même temps de ses intentions Louis de Praet, son ambassadeur en Angleterre. Il le chargeait d’annoncer à Henri VIII qu’il ne désarmait pas et qu’il le priait de ne pas désarmer lui-même, afin d’être prêt à attaquer la France en cas de refus des satisfactions qu’il exigeait pour ses alliés comme pour lui. Le vice-roi de Naples et le duc de Bourbon informeraient directement le roi d’Angleterre de la réponse que ferait François Ier aux articles portés par Beaurain, et, s’il ne les acceptait pas, on entrerait sur-le-champ en campagne. Beaurain eut ordre dépasser par la France et de faire connaître ces conditions à la régente avant de les porter au roi son fils.


IV

La duchesse d’Angoulême était à Lyon, où elle avait établi son séjour lorsque François Ier était descendu en Italie, pour être plus à portée de lui envoyer des secours. En apprenant sa défaite et sa captivité, elle en avait été bouleversée, mais elle ne s’en était point laissé abattre. Comme elle le dit avec vérité, « en voyant l’urgent besoin de pourvoir aux affaires et à la défense du royaume, elle ne perdit pas le cœur[2]. » Elle annonça partout ces funestes événemens dans les termes les plus propres à raffermir les courages, et elle prescrivit à tous ceux qui exerçaient quelque autorité dans l’état de veiller à ce qu’ils n’eussent pas de dangereuses suites. Elle appela auprès d’elle les princes et seigneurs du sang, les gouverneurs des provinces, les délégués des parlemens et quelques notables personnages de la ville de Paris, pour l’aider de leurs conseils en ces difficiles conjonctures. Elle les adjoignit à ses ministres, dont les deux principaux furent le trésorier Florimond Robertet

  1. Lettre de Charles-Quint à Ferdinand du 25 mars 1525. — Bucholtz, t. II, p. 27.
  2. Lettres-patentes de la régente, du 10 septembre, pour imposer 2,661,000 livres. — Captivité de François Ier, p. 313.