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Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 61.djvu/575

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VII

François Ier fut d’abord enfermé dans la tour carrée de les Lujanes, ainsi nommée parce qu’elle appartenait à don Fernando Lujan. Elle avait été choisie comme la plus forte des tours qui flanquaient l’enceinte de Madrid. François Ier n’y resta pas longtemps. L’Alcazar, destiné à lui servir de demeure, étant prêt à le recevoir, il y fut conduit et établi. Le donjon où il devait passer tant de mois dans les tristesses de la prison, les accablemens de la maladie, les angoisses d’une négociation agitée et interminable, était haut, étroit et sombre. Il s’élevait non loin du Manzanarès, presque à sec dans cette saison, et avait vue sur la campagne aride du vaste plateau de Madrid. La chambre disposée pour le roi prisonnier n’était pas très spacieuse ; on y arrivait par une seule entrée, et l’unique fenêtre qui y laissait pénétrer la lumière s’ouvrait du côté du midi, à environ cent pieds du sol, à peu de distance du Manzanarès. Cette fenêtre, pratiquée dans l’épaisseur de la muraille, était assez grande pour former comme un cabinet par son profond enfoncement. Vitrée intérieurement, elle se fermait au dehors par une double grille de barreaux de fer scellés dans le mur. Un lit pour le roi, des coffres pour les objets de sa toilette et de son service, quelques tables et des sièges pour ceux qui étaient admis à lui tenir compagnie ou à le visiter, composaient l’ameublement de cette chambre, dont les murailles se couvrirent bientôt de tentures à fleurs de lis apportées de France et sur lesquelles se détachaient, avec l’écusson royal, l’emblématique salamandre de François Ier et son F couronnée[1]. Alarcon, placé dans le voisinage du roi avec sa troupe d’arquebusiers, qui occupait surtout la partie inférieure de la tour, n’avait pas de peine à veiller sur le prisonnier confié à sa garde.

Bien avant qu’il entrât dans une demeure où il devait rester plus longtemps qu’il ne le croyait, les ambassadeurs de la régente sa mère, François de Tournon, archevêque d’Embrun, et Jean de Selve, premier président du parlement de Paris, s’étaient rendus auprès de l’empereur à Tolède. Les instructions qu’ils avaient reçues[2] ne leur permettaient d’aller, pour le rétablissement de la paix et la délivrance du roi, ni jusqu’aux propositions portées par

  1. Le dessin d’un fragment de cette belle tapisserie a été imprimé, d’après une copie du temps, dans Captivité de François Ier, planche VIII, p. 507.
  2. Les instructions sont du 28 avril et du 6 juin, dans Captivité de François Ier, p. 174 et 198.